LE PASSAGE
(Prix Théophraste-Renaudot 1954)
Malade, d’aspect squelettique, Palabaud, hôtelier en Polynésie, a dû rentrer en France, ramenant une vahiné, Vaïte, qui vient de le quitter.
Depuis des mois Palabaud n’avait couché seul et, sans Vaïte près de lui, ne pouvait dormir. [...]
Une nuit, il s’habilla et partit à grands pas. [...] De l’autre côté de la rue, une porte vitrée laissait sourdre une lumière jaune et indécise où des ombres passaient : un air de musique assourdie arrivait jusqu’à lui. Il hésita longtemps, attiré par la vie devinée audelà des vitres, puis traversa la rue et poussa la porte. [...]
Le garçon avait apporté le champagne ; Palabaud en but une gorgée, se sentit mieux et se dit que malgré le poids fâcheux des regards, il avait trouvé dans le cabaret un remède à son insomnie. [...] Dans l’atmosphère floue, par le prodige d’une musique insinuante et sous l’effet du champagne, le malaise habituel de Palabaud se dissipait. L’oubli se levait ; un instant tout trouble physique fut aboli.
1954