1908 / 1er voyage en avion d’une ville à une autre
Au début de l’année 1908 les pilotes maîtrisaient encore assez mal leurs appareils, ils décollaient et tentaient de rester en l’air le plus longtemps possible mais sans pouvoir décider d’une destination.
Enfin Henri Farman se sent prêt à tenter la réalisation de son rêve : Décoller de sa base de Châlons en Champagne pour atteindre la ville de Reims …
Durant les 10 premiers mois de 1908, les vols d’avion sont expérimentaux et se limitent à des « tour de piste », avec un champ d’action limité aux seuls abords de la zone d’envol.
Le 30 octobre 1908 ne pouvant supporter plus longtemps les limites étriquées des pistes balisées, visant des horizons plus lointains, Henri Farman tente un extraordinaire vol depuis le camp de Châlons en Champagne vers la ville de Reims. Il ne s’agissait plus, comme dans d’autres cas, de décoller simplement pour se laisser porter au gré des vents et arriver le plus loin possible. Il décide de diriger son appareil vers une destination précise choisie avant l’envol : le domaine Pommery à l’entrée de Reims.
Henry Farman est ainsi reconnu comme le 1er pilote au Monde à avoir assumé le risque de cesser de tourner en rond autour de sa base, pour faire un « voyage de ville à ville ». Ayant atteint le Moulin de la Croix du Sablat, il longe ensuite le route de Reims jusqu’au Domaine Pommery.
Lorsqu’ Henry Farman franchît la ligne du chemin de fer, prés de son atelier de Mourmelon - Champagne, les journalistes se font lyriques et évoquent pour la 1ère fois la mise en présence de 2 moyens de locomotions celui du présent (le chemin de fer) et celui de l’avenir (avion). La voie serve et la voie libre écrivait-on dans l’enthousiasme de l’époque.
Les cartes postales évoquent l’étonnement, la stupéfaction, l’enthousiasme, l’admiration générale de la population active. L’étonnement est d’autant plus grand que le « voyage » se réalise à basse altitude et suscite étonnement et admiration de la population locale. Hommes et animaux observant avec surprise ces nouveaux oiseaux à moteur et citadins, la champagne entière est stupéfaite et enthousiaste.
Après seulement à peine plus d’un quart d’heure de vol, Farman atterrit à Reims dans le champ de la cavalerie contigu du Domaine Pommery. Le trajet d’environ 27 km est réalisé à 40 m d’altitude en une vingtaine de minutes, soit une vitesse moyenne de l’ordre de 80 km/h. L’exploit n’était ni la vitesse ni la distance (assez courte) mais celui d’avoir atteint une destination précisément fixée avant le départ. Ce 1er « voyage » aérien d’une ville à une autre ouvre ainsi la voie aux transports aériens. Le pilote décide enfin de son lieu d’arrivée.
Ce sera le 1er vol mondial de ville à ville. A son arrivée au domaine Pommery de Reims, le pilote est immédiatement reçu par la Direction de la Maison Pommery, dont les vignerons, cavistes et employés avaient été autorisés à cesser le travail pour faire à ce héros l’ovation qu’il méritait.
A son arrivée chez Pommery, Henry Farman exprime ses émotions : un rideau d’arbres à éviter immédiatement après le décollage, le moulin de Mourmelon à contourner sans trop savoir de quel côté, quelques inquiétants ratés dans le bruit du moteur de cinquante chevaux avec l’hélice dans le dos, un tournevis perdu retrouvé dans les filins à l’arrivée, mais « J’ai goûté à 34 ans à la plus belle joie de ma vie : le charme de voler au-dessus de mes semblables ».
Pendant que la Direction de la Maison Pommery lui accordait le réconfort festif que l’on imagine facilement, l’avion d’Henry Farman était démonté, puis chargé sur des camions Pommery pour le ramener en toute sécurité par la route vers Châlons-Champagne. En effet, le brillant pilote avait prévu de disputer dès le lendemain le Prix de la plus haute altitude atteinte en avion. A Reims et à Mourmelon-Bouy, deux monuments commémorent ce 1er voyage aérien de Ville à Ville de l’histoire mondiale de l’aviation réalisé en Champagne.