Il est actuellement admis que les blocs de craie en tant que pierres de construction furent utilisées dès la période romaine. La récente mise à jour de caveaux ou caves, datés du Ier au IIe siècle, au cours des recherches archéologiques concernant le site du conservatoire, a permis l’observation de nombreuses maçonneries appareillées en blocs de craie.
D’autre part, la découverte d’un rostre de bélemnite inclus dans l’un de ces moellons permet de localiser l’origine semi-profonde de la roche utilisée qui pouvait être extraite du fossé antique situé à proximité ou bien provenir d’hypothétiques carrières romaines clans une zone où la puissance de la roche crayeuse peut atteindre 50 m.
Au Moyen Age, les structures appareillées en moellons de craie sont plus apparentes pour les archéologues d’aujourd’hui. Elles sont situées en certains points de la basilique Saint-Rémi et entrent surtout dans la composition de la maçonnerie du dernier vestige extérieur des fortifications médiévales encore visible, et un peu oublié, la Tour du Puits (XVe siècle).
À partir de 1209 le tracé de la grande enceinte médiévale était fixé. La construction des remparts du XIIIe siècle au XIVe siècle allait englober le centre initial de la ville et le bourg Saint-Rémi, Saint-Nicaise. Sans émettre d’incertains calculs de probabilité, il est possible, grâce à l’abondante iconographie du XIXe siècle, d’imaginer l’ampleur de ce travail de fortification. Ce rempart mesurait près de 6 km et avait nécessité un minimum de 200 000 m3 de matériaux dont environ 60 000 m3 de moellons de craie, et ceci hors ouvrages de défense particulière et d’artillerie.
L’examen des comptes et de différentes pièces administratives du XIVe au XVIe siècle nous permet de voir apparaître la craie sous des dénominations diverses : tantôt nommée « croyes » ou « croies » pour les modules taillés, chaperons pour les parties les plus ouvragées ; sous forme de chaux vive ou de chaux de croyes pour la composition des mortiers additionnés de tuiles battues.
Si la craie n’est pas présente systématiquement dans tout le rempart, la chaux, quant à elle, demeure la base de tous les liants et mortiers du Moyen Age. Un minimum de 15 000 m3 de chaux vive fut nécessaire à la construction des remparts. Cette chaux vive difficilement transportable, de par sa constitution caustique, restera le liant primordial pour la réalisation des mortiers, avec adjonction de grèves et de tuiles battues ou pilées.
À toutes les époques avant l’invention de ciment de Portland, vers 1825, la chaux de craie ou de calcaires divers, plus ou moins hydraulique, constitue l’élément essentiel pour la composition des liants et autres substances.
Si l’industrie textile du Moyen Age a certainement eu une consommation importante (difficilement chiffrable) de chaux vive ou caustique qui, rappelons-le, nécessite une production locale du fait de sa durée de conservation limitée dans le temps, les professions annexes du bâtiment sont également de gros utilisateurs de ce produit de base qui entre dans la composition de toutes les fresques et peintures diverses.