UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

La protection des vins de champagne par l’appellation Roger Hodez

§ II - Les origines du Vin de champagne mousseux

Son Essor

Les Vignobles de la Champagne ont été connus dès l’antiquité [1]. Ils étaient déjà réputés au temps de Dioclétien et l’empereur Probus, entre deux guerres, occupait ses troupes à replanter les vignes situées près de Reims et de Châlons. Le témoignage de Pline et de Martial nous confirme l’ancienneté de ces vignobles, et des documents de diverses époques en parlent en termes élogieux.

De puissants souverains de l’Europe en étaient même arrivés à y acquérir des vignes et Henry IV tenait à prendre le titre de Seigneur d’Ay. Le vin de Champagne, toujours comme vin non mousseux, fait son apparition aux sacres des rois où la finesse naturelle de son bouquet le faisait apprécier tout spécialement. Les fins dégustateurs de la Cour de Louis XIV, ceux qui s’intitulaient « L’Ordre des Coteaux », consacrèrent la vogue du vin de Champagne. « N’épargnez aucune dépense pour avoir du vin de Champagne, écrivait en 1671 Saint Evremond au comte d’Olonne. Il n’y a pas de province qui fournisse de plus excellents vins pour toutes les saisons que la Champagne ».

Il ne s’agissait encore à cette époque que du vin non mousseux. Ce n’est en effet que vers 1670 que s’opéra, probablement par hasard, la découverte de la mousse par le bénédictin [Dom Pérignon_>personne 4371], cellerier de l’Abbaye d’Hautviller, près d’Epernay. Possédant des connaissances vinicoles très approfondies, il sût tirer parti des propriétés spéciales des vins des coteaux champenois et leur donner de la vogue. L’apparition de ce nouveau vin ne fut pas du reste sans susciter une violente opposition. Des épithètes peu flatteuses lui sont décernées telle que : "saute-bouchon", "mousseux verjus" ou "poison vert apprêté pour des cervelles frénétiques". On l’accuse même de donner la goutte à ceux qui le consomment et les partisans du Bourgogne n’étaient pas les moins acharnés à dire du mal du nouveau venu. Mais la différence de genre entre le vin mousseux de Champagne et le vin de Bourgogne permit aux partisans de ce dernier de se rallier au courant grandissant en faveur du Champagne sans renier pour cela leurs anciennes attaches. Sous Louis XV et Louis XVI, l’industrie vinicole devint très florissante et la réputation du vin de Champagne, mousseux ou non, s’accrût considérablement en France comme à l’étranger. En 1718, l’abbé Dubois demandait au régent d’envoyer en Angleterre des vins de divers crus français parmi lesquels trente pièces de vins de Champagne nature, et celles-ci étaient toutes destinées au roi.

Mais si la renommée du vin de Champagne était déjà importante, la fabrication en vin mousseux ne commença toutefois à se vulgariser qu’à partir de la Révolution. Son essor mondial s’accrût au XIXe siècle dans une proportion importante, notamment après la découverte des chemins de fer. Quelques chiffres précis de la seconde moitié du XIXe siècle permettront de s’en rendre compte : pendant l’année statistique l854-55, il se vend en France 2.452.743 bouteilles et à l’Etranger 6.895.773, soit en tout 9.348.516 bouteilles ; en 1872-73, l’Etranger à lui seul absorbe près de 19.000.000 et les années précédant la guerre de 1914 nous montrent une exportation de 20 millions environ sur une vente totale d’une trentaine de millions.

Notes

[1Voir « Le vin de Champagne » par N. E. LEGRAND. « Le vignoble et le vin de Champagne » par G. CHAPPAZ et ALEXANDRE HENRIOT. POINSIGNON op. cit. Tome III, p. 391 - Musée rétrospectif de l’exposition de 1900 : Matériel et procédés de la viticulture page 67 et suiv.