Œuvre d’Eric Glâtre de 2001
(actualisation UMC)
La figure légendaire de Dom Pérignon doit beaucoup au Mémoire sur les vins de Champagne de l’avocat J. P. Louis, époux de Virginie Perrier. On allait dès lors attribuer au moine de Hautvillers toutes sortes d’innovations : du bouchon de liège à la flûte, du collage des vins au dépotage par siphonnage...
Dom Pierre Pérignon devient - pour près d’un demi-siècle - « procureur » de l’abbaye Saint-Pierre d’Hautvillers.
Cela a un sens juridique clair : il a reçu procuration des membres de la communauté monastique pour mener leurs affaires, il est en somme le « mandataire social », le « patron » temporel de cette communauté.
Au nombre de ses attributions figurent la direction des vignobles et la production des vins. Il s’en acquittera au mieux. Ayant reçu en compte 10 ha de vignes assez mal tenues, il remet à son successeur un domaine de 24 ha, grandement amélioré sous le rapport de la qualité des terres et de leur état. Et pour donner à ses vins régularité et excellence, il reprend à son compte, en l’enrichissant d’une technique nouvelle, la notion de l’assemblage.
Dans sa monumentale Histoire de la vigne et du vin en France des origines au XIXème siècle, Roger Dion y voit la cause de l’unification sous le vocable « vins de Champagne » des crus de la Vallée de la Marne et de la Montagne de Reims.
L’innovation de Dom Pierre Pérignon consiste, avant de les pressurer, à assortir systématiquement les raisins de diverses origines, et pas seulement d’une seule vigne, soit qu’ils aient été vendangés dans les différentes parties du domaine de l’abbaye, soit qu’ils proviennent des livraisons reçues par celle-ci au titre de la dîme qui lui est dûe par plusieurs villages des environs et qui est acquittée en vins, en raisins ou en espèces. Dom Pierre Pérignon a ainsi à sa disposition un choix de raisins qu’il fait mélanger avec discernement sur les pressoirs que l’abbaye possède à Hautvillers, Champillon et Dizy, afin d’en harmoniser les qualités et d’en faire oublier les défauts.