Face à cette difficulté, l’Union des Syndicats du Commerce des Vins de Champagne accepte, en 1959, la proposition du SGV de conclure un contrat interprofessionnel.
Celui-ci garantit pour huit ans à tous les Vignerons qui acceptent d’y engager leurs raisins, non seulement un prix indexé sur celui de la bouteille mais aussi l’achat de leur récolte en toute circonstance. Pour les Maisons, l’objectif est de sécuriser les Vignerons livreurs qui seront moins tentés par la manipulation. Grâce à la certitude de vendre leur raisin à bon prix sur plusieurs années, ils seront aussi à même de mieux accepter une augmentation des plantations. Entre 1945 et 2019, les surfaces plantées seront multipliées par trois et les ventes par dix (de 30 à 300 millions de bouteilles).
Le contrat interprofessionnel a cependant certains effets pervers. Les raisins étant en quelque sorte « prévendus », les Vignerons ne sont pas incités à réaliser des efforts qualitatifs. De surcroît, le système de répartition du raisin maintenu après 1945 favorise les achats de bouteilles sur lattes (déjà champagnisées) comme un moyen, pour les Maisons, d’augmenter leurs approvisionnements. Devant les déviances du système et la baisse de l’engagement du Vignoble, le contrat est finalement abandonné en 1990.
Au même moment, le champagne connaît une crise identitaire. Certains procédés commencent à être dénoncées par des journalistes anglais. Le Syndicat du Commerce, rebaptisé Syndicat de Grandes Marques, envisage de retrouver son esprit initial de club de Maisons irréprochables dans leurs pratiques, en conditionnant toute adhésion à des critères stricts qui soient de véritables garanties pour les consommateurs.
Selon l’esprit collectif champenois, c’est finalement la logique inverse qui l’emporte, celle du rapprochement des anciens Syndicats séparant « petite » et « grande bouteille », pour ne plus laisser subsister que l’Union des Maisons de Champagne (UMC). Cette fusion doit permettre aux plus exigeants d’entraîner les autres.
En 1992, la première guerre du Golfe provoque une grave crise économique qui n’épargne pas la Champagne. L’UMC et le SGV « profitent » de la baisse des volumes pour décider de réduire le rendement au pressurage, ce qui constitue une mesure qualitative forte. Ils créent également la réserve qualitative qui est un puissant outil d’assurance-récolte et de régulation de la filière : les années favorables, des vins sont mis en réserve pour être utilisés en cas de récolte déficitaire.
Dans les années 2000, l’UMC et le SGV, réunis au sein du Comité Champagne, s’engagent fortement dans le développement durable. Première filière à réaliser son bilan carbone, la Champagne développe une certification « Viticulture Durable en Champagne », plus ambitieuse encore que celle imaginée au niveau national de « Haute Valeur Environnementale ».
L’histoire du champagne est une quête sans fin de l’excellence que Vignerons et Maisons s’imposent au sein d’une organisation de filière unique au monde. En 2015, reconnaissant leur valeur universelle exceptionnelle, l’UNESCO inscrit les « Coteaux, Maisons et Caves de Champagne » sur sa liste du Patrimoine mondial.