ESSAI SUR LE VIN DE CHAMPAGNE
(Champagne Paillettes d’or)
A M. Ernest Deleuze
On se mit à table. [...] Le vin de Champagne [...] fit son apparition pendant qu’on découpait le rôti : la bouteille était coiffée d’or, à son col elle portait une cravate à filets d’or et sur une étiquette, dorée aussi, on lisait "Champagne paillettes d’or Minet Jne et Ce, à Reims. »
Des détonations se firent entendre, les bouchons sautèrent et le vin jaillit des bouteilles dans les coupes, au milieu d’un accueil enthousiaste : dans le vin et la mousse roulaient des paillettes d’or. [...] Il faisait à lui seul la lumière ! il brillait dans ma coupe, ce vin étrange, comme de l’or en fusion. Mélangées aux flots d’écume qui bouillonnaient dans le cristal, ces paillettes d’or montaient à la surface, redescendaient au fond, dansaient, tournaient, s’enlaçaient, tourbillonnaient dans la blonde liqueur comme des insectes d’or dans un rayon de soleil.
Je regardai de plus près encore ces paillettes tournoyer avec les bulles qui venaient éclater contre les parois de ma coupe. C’était bien de l’or ! Je bus, - c’était bien du vin ! mais quel vin ! - [...]
Quoi de plus réjouissant [...] qu’un verre de vin de Champagne ? N’est-ce pas un volcan en miniature ? Au fond de la coupe le feu, à la surface l’écume blanche qui figure la neige. - L’écume se dissipe, la neige se fond, le volcan lance des torrents de flammes. C’est le moment d’approcher le verre de ses lèvres.
1863