LES QUATRE SAISONS DE L’ETE
... Un serveur me propose de prendre place au bar.
Je me hisse sur l’un de ces tabourets de cuir rouge où, bien avant moi, Tamara de Lempicka, Marlène Dietrich, Gloria Swanson, ou, plus récemment, Lou Douillon, Charlotte Rampling et Carole Bouquet se sont assises, fatales. Je croise les jambes, lentement. Un ralenti de cinéma. Je ne m’étais jamais tenue comme cela auparavant. Aussitôt, je rougis. Le barman me tend la carte des cocktails. Rien que les noms des ingrédients me font tourner la tête. J’hésite depuis plusieurs minutes, lorsqu’une voix d’homme chuchote, tout près, dans mon cour :
- Oubliez tout ça. Il n’y a que le champagne qui vous aille.
Je frisonne. Mon Dieu, cela arrive si vitre. Comme l’appétit des hommes est insatiable, et leur urgence à posséder parfois si peu flatteuse. Instinctivement, je tire sur ma robe, pour la rallonger - un vieux réflexe de feu Monique. J’aime bien cette voix. Chaude. Grave. Bien posée. J’aime les mots qu’elle vient de prononcer. Précis et volontaires. Des mots de connaisseur. Lorsque je me retourne, lentement, pour découvrir son visage, il a disparu. Sans doute n’a-t-il pas aimé ce qu’il a vu. Mes jambes. Ma silhouette. Mon âge.
Je commande une coupe de champagne.