LES ROIS EN EXIL
Texte de l’édition Dentu, 1879, Paris, Ed. Originale — 1879
Romanciers réalistes et naturalistes
4. Le roi fait la fête — p. 104
parfum de pâte chaude qui lui fit sentir cruellement les premières atteintes de la faim - il était à jeun, le pauvre homme ! En haut, le roi prisonnier, mais débarrassé d’un lourd souci, lisait, buvait son Roederer, regardant de temps en temps par un coin du rideau si le crocodile était toujours là.
Le soir, lorsqu’il rentra à Saint-Mandé, le vieux Rosen fut reçu par le plus ingénu sourire de la princesse. Il comprit qu’il était joué et ne souffla mot de l’aventure. Elle s’ébruita pourtant. Qui sait par quelles fissures de salon ou d’antichambre, par quelle glace abaissée d’un coupé, par quel écho renvoyé du mur sourd aux portes muettes se répand à Paris un bruit scandaleux, jusqu’à ce qu’il arrive au grand jour, c’est-à-dire à la première page d’une feuille mondaine, et de là parle à la foule, entre dans des milliers d’oreilles, devienne la honte publique après avoir été l’anecdote amusante d’un cercle ? Pendant huit jours tout Paris s’égaya de l’histoire du petit mitron. Les noms chuchotés aussi bas qu’il est possible pour d’aussi grands noms ne pénétrèrent pas l’épiderme épais d’Herbert. Mais la reine eut quelque soupçon de l’aventure, car elle qui, depuis une terrible explication qu’ils avaient eue à Leybach, ne faisait jamais de reproches au roi sur sa conduite, le prit à part à quelque temps de là, un jour, comme ils sortaient de table.
"On parle beaucoup", dit-elle gravement, sans le regarder,
Autre référence : 1879, Gallimard, p. 925