UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

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Amadeus Hoffmann

Littérature générale (1813)

DON JUAN
AVENTURES ROMANESQUES D’UN VOYAGEUR ENTHOUSIASTE

Le narrateur assiste au théâtre de Bamberg à une représentation de Don Giovanni de Mozart .
La finale avait commencé sur un ton d’insolente allégresse : « Gia la mensa è preparata ! » Don Juan, attablé, caressait deux jeunes filles, et faisait sauter bouchon sur bouchon, afin de libérer les esprits qui fermentaient dans leurs étroites prisons.

LE MAGNÉTISEUR
SCÈNES DE LA VIE PRIVÉE

Une conversation entre le « baron » et ses enfants Ottmar et Maria.

“Songes, mensonges”

[...] Le baron répéta d’une voix sourde : « Tout rêve est de l’écume. - Je m’empare, repartit Ottmar, de ce dicton même des matérialistes qui trouvent tout naturels les plus merveilleux phénomènes, tandis que souvent la chose la plus normale leur paraît absurde et inconcevable, et j’y vois un sens allégorique remarquable.

-  Quelle stupide interprétation donnes-tu, s’il te plaît, à ce vieil et trivial adage ? demanda Maria en baîllant. Ottmar, en guise de réponse, reprit en souriant les paroles de Prospero : « Relève les franges du voile de tes yeux et écoute-moi avec bonté !... Sérieusement, chère Maria, si tu avais moins envie de dormir, tu aurais déjà pressenti de toi-même que, puisqu’il s’agit de rêves, c’est-à-dire de l’une des manifestations les plus extraordinaires de la vie humaine, cette comparaison avec l’écume ne peut s’entendre, à mon avis, que si l’on pense à l’écume la plus noble de toutes. Or, c’est évidemment celle de l’effervescent, pétillant et impétueux champagne, que tu ne dédaignes pas de flûter quelquefois, malgré le fier mépris qu’en véritable demoiselle tu manifestes pour le jus de la treille en général. Vois ces milliers de petites bulles qui montent le long du verre comme autant de perles et bouillonnent à la surface, ce sont les esprits volatils qui se dégagent impatiemment de leur prison matérielle. Ainsi vit et se meurt, pareille à cette mousse, notre essence spirituelle affranchie de ses liens terrestres, elle déploie gaiment ses ailes, s’élance avec bonheur au-devant des esprits supérieurs de même ordre, hôtes de l’empire céleste qui nous est à tous promis ; elle admet et comprend sans effort, dans leur signification la plus intime, les phénomènes surnaturels. Il se peut donc aussi que les rêves naissent de cette mousse écumeuse qui suscite nos esprits vitaux, devenus libres et flottants quand le sommeil vient enchaîner nos sens ; il se peut que ces rêves nous fassent pénétrer dans une vie d’intensité supérieure, qui nous permet non seulement de pressentir, mais aussi de comprendre toutes les manifestations de ce monde mystérieux des esprits, de sorte que notre âme s’élève au-delà des limites de l’espace et du temps.

1813
Fantaisies à la manière de Callot

Traduit de l’allemand.

KREISLERIANA

On parle sans cesse de l’inspiration que les compositeurs conquièrent par l’usage des boissons fortes. [...)
II est certain que [...] la boisson spiritueuse accélère l’évolution des idées. [...] L’homme ingurgite du vin, et les engrenages intérieurs tournent plus vite ! [...]
Je recommanderais : [...] pour l’opéra, du très fin bourgogne ; pour l’opéra-comique, du champagne.

1814

Traduit de l’allemand.

LA MAISON DÉSERTE

Au cours d’un dîner.
Les larmes vinrent aux yeux de ma voisine. « Je suis une folle enfant, n’est-ce pas ? » dit-elle en se retournant vers moi. Elle s’était déjà plainte de migraine. « C’est, lui répondis-je avec ingénuité, un effet ordinaire du mal de tête nerveux, et rien n’est plus efficace en pareil cas que l’esprit subtil et joyeux qui pétille dans la mousse de ce poétique breuvage. » En même temps, je versai dans son verre du champagne, qu’elle m’avait d’abord refusé ; tout en y goûtant, elle me remercia d’un coup d’oeil de l’interprétation que je donnais aux pleurs qu’elle ne pouvait dissimuler. Je crus voir enfin la sérénité renaître dans son coeur.

1817
Contes nocturnes

Traduit de l’allemand.

L’ENCHAÎNEMENT DES CHOSES

« Le narrateur, souffrant du genou, danse avec difficulté.
Eh bien donc, quand cette malheureuse tyrolienne fut terminée, je me retirai, renonçant à danser, dans un salon attenant où me suivit aussitôt le bon Cochenille qui s’empressa de me verser du champagne. Le vin me donna une vigueur nouvelle ; je ne ressentis plus la moindre douleur. Le « seize » allait commencer, je m’élançai dans le grand salon, courus près de Victorine, et saisissant sa main que je baisais avec ardeur, je pris place dans le quadrille.

1821
Contes des Frères Sérapion

Traduit de l’allemand.

LE CHAT MUR

J’ai connu d’honnêtes gens fort graves, qui le soir s’emplissaient de champagne comme d’un gaz propice, afin de pouvoir monter dans la nuit, ballons et passagers à la fois.

1822

Traduit de l’allemand.

LES MYSTÈRES

Le docteur [...j se mit à rire au nez de son ami. « Votre mal, dit-il n’exige pas autre chose qu’une certaine boisson à l’écume effervescente, hermétiquement fermée en bouteille. » [...]
Après le souper, on apporta la boisson officinale ordonnée au malade. Tout le monde voulut y goûter. Hff. avala la potion sans donner le moindre signe de dégoût. [...]
Une chose étonnante, c’est que Hff. passa une nuit fort tranquille et ne fit aucun mauvais rêve. Il attribua cet état de calme à la médecine salutaire du docteur.
A table [...] je remarquai avec plaisir que Théodore perdait peu à peu [...] son humeur glaciale. Il but coup sur coup plusieurs verres de champagne, ses regards s’animèrent, la pâleur mortelle répandue sur ses joues se dissipa.

LES MÉPRISES
FRAGMENTS DE LA VIE D’UN FANTASQUE

“Songe et réalité”

« Quel singulier hasard ! » se dit le baron en se renversant mollement dans un sofa de la chambre n° 14 de l’hôtel du Soleil ; quel singulier hasard !... Patras était le but de mon voyage, le consul Andreas Condogur l’homme qui devait m’indiquer maroute ; eh bien ! non... je ne suis pas allé plus loin que le village de Zehlendrof. [...]
Sur les dix heures, un garçon se présenta et servit un souper fin. Le baron, jugeant à propos, vu sa disposition morale, de prendre quelque boisson éthérée, demanda du champagne. Comme il achevait le dernier morceau d’une volaille rôtie, il s’écria sentimentalement : « Que sont nos besoins matériels, quand l’esprit pressent le divin ?... »
Puis il s’assit à la turque, les jambes croisées sur le sofa, prit sa guitare, et entonna une romance grecque, dont il avait appris à grand-peine la prononciation, et sur laquelle il avait composé une mélodie ; le tout produisit aux oreilles un effet étrange et pouvait passer pour un morceau caractéristique. Le baron s’était animé. La première bouteille de champagne vidée, il s’en fit apporter une seconde. Peu à peu, il lui sembla que les accords qu’il tirait de son instrument se détachaient, s’élevaient, planaient librement dans les airs, en redoublant de force et de sonorité.

1825
Derniers Contes
Œuvre posthume

Traduit de l’allemand.