DU RIFIFI CHEZ LES HOMMES
Les clilles 1 se farcissaient du champ’ comme s’il en pleuvait. Y avait de
tout parmi eux : des truands, des industriels, même une tablée de pedzouilles. Ces derniers n’étaient pas à la bourre pour la valse des bouchons. Y s’appuyaient leur piquette d’un seul trait, à croire qu’y s’croyaient dans leur cambrousse, au cul de leurs tonneaux de cidre. [...]
Au comptoir, perchées sur des tabourets, deux nanas se laissaient pincer les noix par des corniauds en goguette. [...] La pute auréolée d’une tignasse rousse [...] lança, tournée vers le barman
« Ray ! Une autre rouille’ dans la glace ! Ordre de ce monsieur. » [...]
« Voyons, mon trésor, rechigna-t-il... On n’a pas encore vidé celle-ci. »
Les mousmés, qui marchaient à la ristourne sur les bouteilles de champ’, firent la grimace. La rousse n’en susurra pas moins
« Comment ? Un beau gosse comme toi ! Si radin ! J’l’aurais pas cru. »
Le branque 3, qui ressemblait comme un frère à Frankenstein, ronronna
sous le compliment.
1. Client. 2. Bouteille. 3. Jobard.
« C’est bon, dit-il. » Et en gaffant le barman u Vous pouvez mettre la bouteille. »
Le loufiat haussa discrètement les épaules. Y a longtemps qu’elle était prête, la bouteille !
1953