MONSTRE AIMÉ
Une veuve et son fils. C’est le ils qui raconte.
Elle m’a dit que nous allions nous offrir une petite fête. Rien que pour nous deux. [...] La seule chose que j’avais à faire, c’était mettre les habits qu’elle m’avait préparés sur mon lit. Elle m’a demandé aussi de me coiffer (...] à la mode d’il y a cinquante ans. [...J Je suis donc allé dans ma chambre
et j’y ai trouvé un costume bleu marine, une chemise blanche et une cravate gris pâle. Les affaires avaient appartenu à mon père. [...]
La pauvre femme avait préparé un souper extraordinaire. Elle a fait un [...] voyage jusqu’au réfrigérateur et en a rapporté deux bouteilles de champagne. [...J Ma mère a débouché une bouteille de champagne, a rempli les coupes, et nous avons commencé à souper en silence. [...] Nous avons fini la première bouteille de champagne (elle en avait bu plus de la moitié à elle seule), elle a débouché la deuxième et, à partir de ce momentlà, elle s’est mise à parler presqu’exclusivement de mon père. [...] Elle m’en a dit monts et merveilles. Ensuite, elle a levé sa coupe de champagne et elle a répété que j’étais son portrait craché et qu’elle avait l’impression qu’il continuait à vivre en moi.
1985
Traduit de l’espagnol.