UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

Vendanges, de 2001 à nos jours

2018 - Une campagne sur les chapeaux de roue

2018, Une campagne sur les chapeaux de roue, à peine le temps de dire ouf, que la vendange était déjà là ou presque ! La campagne débute comme à l’accoutumée, vers la mi-avril. Puis à la faveur de sols gorgés d’eau et de températures journalières au-delà des moyennes décennales, les stades phrénologiques s’enchaînent à un rythme soutenu. Dans de nombreux secteurs du vignoble, la campagne se déroule sans encombre du début à la fin. Toute-fois dans l’Axonais, le Perthois et le Barrois, un remake de 2016 semble se profiler en début de campagne, avec une déferlante d’épisodes orageux et des cumuls d’eau exceptionnels sur de courtes périodes. Mais mi-juin, le soleil reprend le dessus. Le calme revient dans ces secteurs. A l’échelle du vignoble, le potentiel de récolte est exceptionnel. L’omniprésence du soleil, pendant toute la phase de maturation puis pendant la vendange, contribue au maintien d’un état sanitaire irréprochable jusqu’au dernier coup de sécateur. 2018 restera dans les mémoires pour sa générosité qualitative et quantitative.

Météo 2018 - 2003 : le retour ?


Hiver pluvieux puis chaleur et faibles précipitations, C’est ainsi que l’on pourrait résumer l’année 2018...

Un automne et un hiver particulièrement humides

Après des vendanges bien arrosées, avec un mois de septembre 2017 enregistrant plus de deux fois un cumul de pluies normal, on a cru à une accalmie des précipitations durant le mois d’octobre. C’était sans compter sur les mois de novembre, décembre 2017 et surtout janvier 2018 qui ont été particulièrement doux et très pluvieux avec des records absolus de précipitations battus un petit peu partout sur l’appellation.

Sur cette période, ce sont des cumuls de l’ordre 275 à 500 mm (pour référence le cumul moyen annuel est de 710 mm en moyenne sur la Champagne) qui se sont abattus en trois mois sur le vignoble provoquant de nombreuses inondations dans les vallée de l’Aube, de la Marne et de la Seine notamment.

Pour terminer cet hiver 2018, le mois de février a été nettement moins pluvieux mais beaucoup plus frais.

Les pluviométries de l’automne 2017 et de l’hiver 2017-2018 ont donc été très largement excédentaires sur la Champagne ce qui n’a pas réellement perturbé le cycle de la vigne et a permis une recharge en eau complète des sols.

Un printemps chaud et orageux

Des températures au-dessus des moyennes

Le mois de mars reste frais en moyenne, mais à partir de début avril, les températures restent, en moyenne, au niveau ou au-delà des normales jusqu’à la fin de la saison végétative.

Un printemps particulièrement orageux

Du fait des températures particulièrement douces, de nombreux orages ont touché la Champagne. Le premier orage impactant le vignoble s’est déroulé le 29 avril dans la Côte des Bar et le Vitryat. Par la suite, des situations de marais barométrique à répétition ont été favorables à la formation de nombreux orages, parfois grêligènes qui ont impacté le vignoble du mois de mai au mois de Juillet. Au total, ce sont plus de 900 hectares qui sont totalement détruits par la grêle en Champagne.

Une pluviométrie très hétérogène

Outre les dégâts évoqués plus haut, les orages enregistrés ont engendré des cumuls de pluies très variables dans l’espace. Ainsi, entre avril et juin, les cumuls de pluies oscillent entre une centaine de millimètres sur le massif de Saint-Thierry à plus de 350 mm dans la Côte des Bar. Malgré de forts cumuls par endroits, la praticabilité es parcelles n’est pas trop détériorée car ces forts cumuls tombent en une seule fois et sont suivis de conditions sèches et ensoleillées qui permettent le passage des engins.

Un été aride : heureusement que l’hiver était pluvieux !

La carte des précipitations sur cette période montre bien qu’aucune région n’a été épargnée par le manque de pluie. Une telle situation de sécheresse générale et continue n’avait jusqu’alors jamais été observée sur une si longue période en Champagne.

Un été sec... Et particulièrement chaud


Dès la fin mars, les températures ont été largement au-dessus des normales. L’été 2018 a donc suivi la lancée en battant tous les records. En effet, l’été 2018 détrône officiellement l’été 2003 (19,36°C) comme étant le plus chaud depuis le début des enregistrements météo sur l’appellation avec 19,63 °C. Malgré des températures minimales assez basses de la fin août à la fin septembre, les températures moyennes sont presque 2° C supérieures aux normales.
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Conclusion

La campagne 2018 a été singulière à plus d’un titre. Après un hiver exceptionnellement pluvieux, le printemps est très doux. Cette chaleur est source d’orages, parfois destructeurs, qui produisent des précipitations très variables sur l’appellation. Par la suite, l’été est particulièrement sec, chaud et ensoleillé, dépassant même les records historiques de 2003.

2018 s’impose donc comme une nouvelle référence en termes de chaleur, de sécheresse et d’ensoleillement pour la Champagne.

Comportement hydrique des sols - Déluge puis sécheresse

Après une fin d’année 2017 et un début 2018 diluviens, le millésime 2018 a débuté sur des réserves hydriques optimales. Le vignoble a ainsi pu commencer l’année sous les meilleurs auspices. Jusqu’à la mi-juin les réserves sont à des valeurs élevées, voire très élevées du fait de précipitations abondantes. Puis, passé ce cap, l’absence de précipitations et les températures élevées engendrent un dessèchement rapide des sols. Peu de précipitations sont enregistrées durant l’été et, arrivé à véraison, des contraintes hydriques marquées sont observées dans les régions les plus sensibles et les moins arrosées. La situation perdure jusqu’aux vendanges et même après avec des cumuls de pluie très faibles.

Rappels sur la météo des sols

La météo des sols. qui nous sert à étudier l’itinéraire hydrique de la vigne est en fait un modèle de bilan hydrique développé par l’INRA. Ce modèle permet d’estimer les quantités d’eau disponibles dans le sol pour la vigne, les résultats étant exprimés en pourcentage de la réserve utile. En début d’année. le sol est très généralement (sauf en 2017) il sa capacité maximale de stockage de l’eau donc 100 % de la réserve utile. Trois niveaux de réserve utile faible. moyenne et forte, ont été définis grâce aux mesures réalisées par le Comité Champagne depuis plusieurs années.
Ensuite, on soustrait il cette réserve utile l’évaporation du sol, l’évapotranspiration de la vigne et on ajoute les précipitations sachant la limite maximale est il 100 % de la réserve utile.

Pour faire fonctionner ce modèle, nous utilisons des données climatiques qui sont fournies par les différentes stations météorologiques déployées par le Comité Champagne : pluie, température et évapotranspiration potentielle. Puis des mesures en cours de campagne permettent d’évaluer l’efficacité du modèle et de le recaler si nécessaire.
Il s’agit des mesures de potentiel hydrique foliaire de base. On prélève une feuille qu’on introduit dans une chambre il pression et on applique une pression pour extraire la sève du pétiole. Plus la pression nécessaire pour extraire la sève est forte, plus la contrainte subie par la vigne est forte. Cette mesure est effectuée la nuit car la majorité de ses stomates et entre en équilibre de tension d’eau avec le sol. Cette mesure est ensuite convertie en pourcentage de réserve utile grâce à une corrélation établie par l’INRA. Puis on compare cette mesure aux données fournies par le modèle et si l’écart est important, on réajuste le modèle pour correspondre à la réalité du terrain.
Des mesures menées en 2016 ont permis de déterminer la réserve utile d’une quarantaine de parcelles à travers le vignoble champenois. A cette occasion, nous avons pu remarquer, en analysant ces données, une différence entre la Côte des Bar qui présente des sols avec des réserves utiles plus faibles que les autres secteurs de la Champagne. Cela s’explique par la nature même des sols. En effet, les sols de la Côte des Bar sont majoritairement issus de l’érosion d’une roche mère Jurassique assez dure. Leur profondeur est donc, en général, assez limitée, ce qui ne permet pas de retenir beaucoup d’eau...

Itinéraire hydrique de l’année 2018

Les précipitations durant la fin de l’année 2017 et le début 2018 ayant été exceptionnellement abondantes, la recharge en eau des sols a été totale sur l’intégralité de l’appellation Le début de saison part donc sur d’excellentes bases, contrairement à 2017 qui a commencé sur des bases déficitaires.

La situation en début de saison est donc tout à fait idéale. La vigne dispose d’assez d’eau pour croître rapidement. Malgré des températures assez élevées, la quantité d’eau disponible est maintenue à des valeurs très satisfaisantes jusqu’à la mi-juin par des averses régulières mais assez localisées.

Dans la Côte des Bar, le Sézannais et l’Ouest de Château-Thierry, les orages de mai et de juin maintiennent les quantités d’eau disponibles au maximum, engendrant même un léger surplus à la mi-juin. Ces valeurs sont cependant contestables car, durant des événements très violents comme les orages, un ruissellement se met en place ; toute l’eau n’alimente donc pas le sol. Le modèle de bilan hydrique prend en compte le ruissellement mais peine encore à le quantifier avec certitude.

Pour résumer, au stade floraison, les conditions sont tout à fait optimales, en terme de bilan hydrique, avec des quantités d’eau disponibles à des valeurs oscillant entre 75 et 95 %.
Floraison
A la mi-juin, des conditions chaudes et très peu pluvieuses se mettent en place. Elles favorisent un dessèchement rapide des sols.

Tout d’abord en surface, avec l’apparition de fentes de dessiccation, puis en profondeur. Bien entendu, ce type de situation n’a rien d’étonnant pour la saison mais ce qui va rendre l’été 2018 exceptionnel c’est la durée de cet événement chaud et sec. Les sols vont se dessécher très rapidement et vont passer dès la première décade de juillet dans des valeurs en dessous de l’itinéraire hydrique idéal. En effet, entre le stade "floraison" et le stade "véraison", les sols vont perdre en moyenne entre 50 et 80 % de leur eau. Les sols arrivent alors à des valeurs qui, en temps normal, ne devraient être atteintes qu’aux vendanges. Les premiers symptômes de stress hydrique apparaissent à la fin du mois de juillet sur les parcelles les plus sensibles de la Côte des Bar ou du Massif de Saint-Thierry.

Durant la maturation, les conditions météo restent chaudes et très peu pluvieuses. La quantité d’eau disponible pour la plante diminue et arrivé aux vendanges il n’en reste qu’entre 5 et 15 % en fonction des endroits. Quelques parcelles sont touchées par des symptômes de stress hydrique plus ou moins prononcé. Cependant, malgré des quantités d’eau restantes dans le sol très basses selon la modélisation, la quantité de parcelles fortement impactées par des symptômes de stress hydrique reste relativement faible.

Symptôme de stress hydrique

Cela peut s’expliquer par deux principales raisons. Premièrement, la vigne est une plante capable de résister à des seuils de contrainte hydrique assez forts. La quantité d’eau correspondant à une contrainte marquée est de l’ordre de 4,5 % d’eau restante et celui d’une contrainte forte de 1,5 %. Ceci peut donc expliquer finalement la rareté des symptômes.
Deuxièmement, la craie qui constitue le sous-sol d’un grand nombre de parcelles est un réservoir d’eau exceptionnel et permet, par remontées capillaires, d’alimenter la plante alors que le sol est fortement asséché. Ce point est à l’heure actuelle en cours d’étude par le Comité Champagne afin d’essayer de comprendre ce phénomène et de quantifier l’apport de la craie dans le bilan hydrique.

Maladies et ravageurs - Incidences sur la vendanges 2018

2018, une campagne sur les chapeaux de roue, à peine le temps de dire ouf, que la vendange était déjà là ou presque !
La campagne débute, comme à l’accoutumée, vers la mi-avril. Puis à la faveur de sols gorgés d’eau et de températures journalières au-delà des moyennes décennales, les stades phénologiques s’enchaînent à un rythme soutenu, Dans de nombreux secteurs du vignoble, la campagne se déroule sans encombre du début à la fin. Toutefois, dans l’Axonais, le Perthois et le Barrois, un remake de 2016 semble se profiler en début de campagne, avec une déferlante d’épisodes orageux et des cumuls d’eau exceptionnels sur de courtes périodes, Mais mi-juin, le soleil reprend le dessus. Le calme revient dans ces secteurs, A l’échelle du vignoble, le potentiel de récolte est exceptionnel. L’omniprésence du soleil, pendant toute la phase de maturation puis pendant la vendange, contribue au maintien d’un état sanitaire irréprochable jusqu’au dernier coup de sécateur, 2018 restera dans les mémoires pour sa générosité qualitative et quantitative.

Mildiou, un début de campagne sous pression

Après un automne et un début d’hiver doux, l’hiver s’installe tardivement courant février et perdure jusque fin mars. La reprise de la végétation se fait sur un rythme classique, Le stade "débourrement" est observé avec un léger retard par rapport à la moyenne décennale (2-3 jours). Côté mildiou, la pluviométrie exceptionnelle du début d’année lui a été plutôt favorable. En sortie d’hiver, le potentiel épidémique est jugé élevé. La maturité des formes de conservation hivernale du mildiou est observée relativement tôt au laboratoire, dès le 20 avril, contre fin avril dans la majorité des situations antérieures. La vigne est alors déjà réceptive. Toutefois, l’absence de précipitations à cette même période repousse l’échéance des premières contaminations. Les sols ressuient enfin et les mouillères s’assèchent.

La faible pluviométrie enregistrée sur le mois d’avril ne suffit pas à inverser durablement cette tendance. Au cours de la dernière décade d’avril, des conditions météorologiques très instables s’installent, se traduisant par un régime d’averses orageuses très localisées. Conséquence, le risque épidémique repart à la hausse.

Les premières contaminations sont enregistrées les 28 et 29 avril. Comme attendu, les premiers symptômes sur feuilles sont découverts au vignoble le 14 mai. Il s’agit, à ce stade, de rares taches éparses. L’apparition des premiers symptômes coïncide avec l’installation d’une ambiance "tropicale" et d’une forte activité électrique en fin de journée. De la mi-mai à la mi-juin, des averses orageuses très localisées, sont enregistrées quotidiennement ou presque. Les franges Ouest et Est du vignoble sont plus touchées. Tous ces éléments sont propices à l’installation du mildiou. Résultats, dès le 20-25 mai, des taches éparses sur feuilles sont observées en tous secteurs, reflétant bien le potentiel épidémique élevé à l’échelle Champagne. A ce stade de la campagne, la vigne approche déjà la préfloraison...

L’oïdium très discret

Fin avril, le modèle Oïdi développé par la société Modeline (adaptation pour la Champagne du modèle bourguignon "Système Oïdium Vigne") indique que le potentiel épidémique est modéré pour ce début de campagne. C’est ensuite la météo qui va déterminer la réalisation ou non du potentiel de l’année.

La surveillance sur feuilles débute la semaine du 22 mai, dans les parcelles de chardonnay, puis s’étend à tous les cépages. Dans la foulée, les premières taches sur feuilles sont décelées dans les parcelles habituellement concernées par de l’oïdium sur grappes, hors réseaux d’observation. Toutefois, sur les différents réseaux d’observation (SBT, Magister, etc), très peu de parcelles présentent des symptômes sur feuilles. A la floraison, moins de 1 % des parcelles du réseau SBT sont concernées par de l’oïdium sur feuilles. L’indicateur régional "feuilles" est faible et classe 2018 parmi les années à risque épidémique "faible à modéré".

Mi-juin, les observations sur grappes prennent le relais des suivis sur feuilles. Les grappes se ferment, et l’inquiétude n’est pas de rigueur. Le suivi se poursuit dans les différents réseaux d’observation et le constat sur grappes reste le même que sur feuilles : peu de symptômes sont observés. Au stade "fermeture de la grappe", c’est-à dire début juillet (avance phrénologique oblige !), l’état sanitaire des parcelles est globalement très satisfaisant. Au bilan, fin juillet, 10 % des parcelles du réseau SBT présentent des symptômes sur grappes, mais en fréquence et intensité généralement très limitées. Sur ces parcelles sensibles, l’oïdium continuera toutefois de progresser sur grappes et sur feuilles au cours de la maturation, plus ou moins selon la stratégie mise en oeuvre enfin de campagne de protection.

L’oïdum n’aura pas été un sujet d’inquiétude en 2018. l’impact de la maladie sur la vendange frise le zéro.

Qualité sanitaire exceptionnelle aux vendanges

Grâce au temps particulièrement clément, la récolte 2018 est particulièrement saine. L’état sanitaire est comparable à ce que nous avons observé en 2012 et 2009, années sèches aux vendanges.

Les prélèvements pour le suivi de la maturation sont éloquents. La courbe de fréquence de pourriture tutoie le zéro. Les retours des correspondants AVC classent effectivement 2018 parmi les plus faibles que nous ayons connues depuis le début de nos statistiques, en 1994.

De la pourriture grise, seule ou associée à des relents d’acide acétique, est ponctuellement observée sur Meunier, dans différents secteurs. Les quelques dégradations sont plutôt observées début septembre.

Tordeuses : année calme à une exception près

Comme en 2017, les conditions météo chaotiques de fin avril à début juin ont perturbé la première génération des tordeuses de la grappe. Les premiers papillons de cochylis et d’eudémis ont été capturés le 23 avril. Par la suite, les activités de vol et de ponte ne se sont jamais réellement enclenchées. Le vent et la pluie, notamment en fin de journée, sont des facteurs les handicapant fortement. Début juin, seules 28 parcelles, essentiellement situées en secteurs non confusés, sur les 150 que compte le réseau SBT, abritent quelques glomérules (2 à 18 glomérules pour 100 grappes). A noter une activité de ponte dans certains secteurs de la Côte des Bar, qui confirme la tendance observée ces 2-3 dernières campagnes.
L’activité des tordeuses dans celte région du vignoble, certes sans conséquence à ce jour, nécessite néanmoins une surveillance et ne doit pas être négligée.

Le vol de deuxième génération débute le 20 juin pour la cochylis et le 4 juillet pour l’eudémis. Contrairement à 2017, la deuxième génération restera aussi discrète que la première. Les fortes chaleurs de la mi-juillet auront raison de la majorité des quelques œufs déposés. Très peu de perforations seront observées lors des dernières tournées d’observations fin juillet. Une exception à souligner : très localement sur un secteur d’Epernay situé hors confusion sexuelle, des perforations ont été observées très régulièrement (plus 70 perforations pour 100 grappes). Ce cas de figure, certes très ponctuel, témoigne toutefois qu’en Champagne, des conditions propices aux tordeuses peuvent encore être réunies. L’évolution de la stratégie de lutte contre la deuxième génération régulièrement constatée, consistant à ne plus agir en préventif des pontes en tout début d’activité mais en fonction de l’observation des œufs au stade tête noir, nécessite d’être bien encadré et assumé en cas d’activité de ponte significative. La limitation des portes d’entrée du botrytis reste l’objectif premier de la lutte contre ces ravageurs. Les leviers d’action restent limités à ce stade, notamment si la dynamique de fermeture des grappes vient compliquer la mise en oeuvre d’une lutte insecticide dirigée sur grappes. Aujourd’hui, les techniques de bio contrôle telles que la confusion sexuelle restent une solution simple et efficace.

Mange-bourgeons et pyrales : ravageurs toujours secondaires

Pyrale plutôt discrèteQuand la phénologie progresse rapidement, l’évolution des bourgeons avant débourrement est rapide, réduisant fortement la période d’exposition aux mange-bourgeons. La campagne 2018 ne fait pas exception à la règle. Les chenilles de mange-bourgeons n’ont eu que peu de temps pour "croquer" du bourgeon. A la mi-avril, sur le réseau SBT, la pression mange-bourgeons est très modérée. Peu de parcelles sont concernées par plus de 15 % de ceps avec au moins 1 bourgeon évidé : un peu plus de 3%, contre 9 % des parcelles du réseau en 2017. Cette année encore, les mange-bourgeons n’ont pas eu d’incidence sur la récolte...

Jaunisses : des prospections renforcées pour la seconde année consécutive

Ces maladies à phytoplasmes, flavescence dorée et bois noir, regroupées sous le même terme de jaunisses, se caractérisent, entre autres, par un symptôme commun avec l’enroulement virai au niveau du feuillage : enroulement du limbe vers la face inférieure avec une décoloration rouge (cépage rouge) ou jaune (cépage blanc) du limbe. Par contre, les jaunisses se distinguent très bien de l’enroulement viral après examen des rameaux et des grappes par, dans le cas des jaunisses, un défaut d’aoûtement des bois (bois de couleur verte ou d’aspect gris caoutchouc) et un dessèchement partiel à total de la grappe.

Cette année encore, les moyens mis en oeuvre par le Comité Champagne, les DRAAF Grand Est et Hauts de France et la Fredon CA, pour déployer les formations pratiques à la reconnaissance de ces symptômes de jaunisses au vignoble sont sans précédent. Avec plus de 50 réunions proposées sur l’ensemble de l’Appellation Champagne, l’occasion a été donnée à tous les professionnels de la filière de venir s’informer et se former sur cette thématique. Plus de 1 400 vignerons ont répondu présents. Les vendanges très précoces ont permis de profiter de plusieurs semaines de feuillage encore vert pour réaliser le volet "terrain" de ces formations. Nouveauté, amenée à se développer dans les années à venir, l’organisation de prospections collectives sur plusieurs communes.
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Maladie du bois dans la moyenne

Les notations effectuées sur 131 parcelles, par les techniciens dans le cadre du réseau de surveillance biologique du territoire (SBT), aboutissent à une expression plutôt "moyenne" des maladies du bois cette année, équivalente à celle de l’année dernière. L’expression est plus faible qu’en 2016, marquée par une saison végétative plutôt "humide", mais plus importante que 2015. L’effet du déficit pluviométrique et du dessèchement des sols durant la saison végétative, facteurs favorables à une réduction de l’expression des symptômes, ont en effet été atténués par une recharge en eau complète des sols pendant l’hiver. Ce scénario a déjà été validé par le passé. Vu le régime hydrique de 2018, les statistiques sont plutôt conformes à ce qui était attendu.

Maturation des raisins - Vite fait, bien fait

2018 marquera les esprits pour plusieurs raisons, Une quantité de raisins abondante, un climat explosant tous les records et.., une maturité encore une fois exceptionnelle par sa précocité et ses caractéristiques.
Retour sur les suivis "matu" et leurs enseignements d’une trajectoire qui pourrait se reproduire de plus en plus souvent à l’avenir...

Le réseau "matu" une belle dynamique

Les préleveurs et saisisseurs du réseau "matu" sont toujours actifs et même, de plus en plus, et nous les remercions pour leur investissement précieux. Le nombre de parcelles inscrites au sein du réseau continue de croître, pour atteindre 596 en 2018.
Les répartitions par cépages et départements restent globalement stables, la meilleure représentativité de l’encépagement et du parcellaire de l’Appellation étant indispensable pour obtenir des résultats fidèles à la réalité.

Malgré la précocité du démarrage du réseau, le lundi 6 août, l’engagement des préleveurs a été important : 40 % des parcelles inscrites sur le réseau sont renseignées, c’est la première fois qu’une telle participation est enregistrée pour un premier prélèvement. Et elle restera importante lors des cinq prélèvements suivants.

Compte-tenu du profil climatique de l’année et de la phénologie, la décision de démarrer les prélèvements début août était cohérente. En effet, le degré potentiel moyen, tous cépages confondus, s’élève déjà à 6,6 %vol. le premier jour.

Les poids de grappes sont, globalement, dans la tendance espérée avec une moyenne confortable de 109 grammes, mais cachant, comme souvent, de gros écarts entre cépages et entre régions. Les grappes de Chardonnay avoisinaient déjà les 120 grammes, tandis que celles du Pinot noir de l’Aube plafonnaient à 95 grammes (116 grammes pour la Marne) et celles du Meunier elles atteignaient 106 grammes. Les blancs présentaient d’ores et déjà une avance confortable’ sur les cépages noirs.

Au fil des prélèvements, les hétérogénéités entre les cépages et les régions, ainsi que le rythme de maturation se précisent. Dans les régions dont les sols les moins profonds permettent une restitution moins importante de l’eau, les vignes accusent le coup. Les grappes grossissent moins dans la Côte des Bar et les secteurs sur sables du Massif de Saint Thierry que dans les terroirs sur craie où la capillarité permet de limiter les effets de la sécheresse et ses incidences.

Si la prise de degré est importante sans être excessive, elle n’est, vraisemblablement, pas liée uniquement à une accumulation des sucres dans les baies, mais également à la concentration de ces sucres. En particulier dans les parcelles situées en secteurs souffrant de la contrainte hydrique.

Pour autant, l’état du feuillage, très vert et complètement fonctionnel, à ce stade, indique que la maturation physiologique n’est pas limitée.

Au global, si les degrés sont élevés à date, car la phénologie a été très précoce, la cinétique de maturation se situe dans la moyenne. La photosynthèse n’est pas entravée par la dégradation du feuillage, mais la quantité de grappes présente et le manque d’eau qui, à l’échelle de l’Appellation n’induit pas de symptômes et tempère la dynamique de maturation, provoquent une prise de degré hebdomadaire moyenne d’1,2 % vol. Une évolution rapide mais inférieure aux cinétiques observées ces dernières années avec des rendements inférieurs.
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Ban des vendanges anticipé

Si les très faibles précipitations enregistrées et prévues ont un avantage indéniable car les raisins sont extraordinairement sains, la précocité nécessite tout de même une certaine capacité d’anticipation.
C’est pourquoi, si dès juillet, le ban des vendanges était annoncé au mercredi 22 août, la possibilité de l’avancer avait été prévue. Cette précaution ne s’est pas avérée inutile et la "commission vendanges", élargie aux délégués régionaux de l’AVC s’est tenue le vendredi 17 août, pour une publication du ban des vendanges le lendemain, dans un ambiance sereine, tous les signaux étant au vert pour la vendange se profilant.

L’acidité, source d’inquiétude pendant la maturation

Malgré des conditions idéales et une qualité sanitaire que l’on pourrait qualifier de parfaite, un sujet a préoccupé les vignerons pendant cette maturation il s’agit de l’acidité totale.
Si les valeurs sont faibles et la chute, au fil des prélèvements, importante, cela n’est pas étonnant. les températures élevées ont naturellement induit une dégradation rapide de l’acide malique, dès le début véraison.

Sur notre réseau interne, composé de 30 parcelles réparties à travers la Champagne, nous n’avions jamais enregistré de valeurs aussi basses : 7,1 g/L au 16 août pour finir à 4,1 g/L au dernier prélèvement du 23 août.

Ces valeurs sont logiques et expliquées. Elles ont, cependant, pu susciter des craintes quant à la qualité finale du millésime, mais également, par rapport à un risque de "tourne" pour certains. Dans les conditions climatiques, une dégradation sanitaire était peu probable. Quant à la qualité des vins, ’aucune corrélation statistique n’est faite entre la qualité du millésime et le niveau d’acidité totale à la vendange.

Si cette maturation précoce et rapide a pu susciter du stress quant à l’organisation des vendanges, sans parler des quantités de raisin à rentrer, l’année 2018 a tout de même offert des conditions idéales pour se donner la possibilité d’obtenir une maturité optimale, Des blocages physiologiques ont été rencontrés, mais de façon sporadique, l’état sanitaire est resté proche de la perfection et la météo a permis d’adapter son circuit de cueillette à l’hétérogénéité des parcelles et des cépages, Tous les critères sont donc réunis pour que 2018 soit un millésime hors norme.

Rendements 2018 - Année pléthorique

Si certaines années peuvent surprendre, en offrant que quantité récoltée inférieure ou supérieure au potentiel estimé, 2018 a annoncé la couleur rapidement : sauf accident, et même sans se prononcer sur les poids de grappes à la vendange, la quantité de raisins vendangés devrait être généreuse.

Des estimations précoces concordantes

Comme chaque année. dès que les inflorescences sont visibles et jusqu’à la nouaison, nous entamons nos estimations de rendement. Les nombreux comptages communiqués par nos partenaires (Magister, GDV, maisons et coopératives) et réalisés au cours des CSCP (Commissions de suivi des conditions de production) nous permettent de quadriller l’aire d’appellation et d’obtenir une vision globale du potentiel de récolte en matière de grappes au m2.

Ces comptages nous ont permis de constater rapidement que la charge agronomique, 12,1 grappes/m2 (fourrières déduites), était bien supérieure à la moyenne décennale de 10,6 grappes/m2. L’expression de "murs de grappes" était fréquemment entendue, tant l’impression d’abondance marquait les esprits, mais ce chiffre n’est pas inhabituel.
En 2013 et 2014, les valeurs étaient proches de 2018 et ce nombre de grappes au m2 était courant dans les années 1990 et 2000.

Après la nouaison, deux éléments nous permettaient d’envisager des poids de grappes importants. En effet, les inflorescences et grappes étaient de belle taille, bien épaulées et conformées. Enfin, les derniers millésimes nous ont également montré que la croissance des grappes en fin de parcours pouvait être surprenante.

Par ailleurs, les résultats issus des dosages polliniques indiquaient un potentiel de 15 500 kg/ha, avec cependant quelques filtres ayant été lessivés par les orages, en particulier dans la Côte des Bar, pouvant induire une sous-estimation.

Ainsi, que ce soit en termes de nombre de grappes - les rameaux présentant trois grappes n’étaient pas rares ! - ou de poids de grappes, début juillet ; nous étions en mesure d’annoncer un potentiel important compris entre 16 000 kg/ha, avec un poids de grappes correspondant à la moyenne décennale et jusqu’à 19 000 kg/ha en cas de grappes particulièrement grosses.

Une floraison rapide et des conditions de développement optimales


Les premières fleurs de Chardonnay ont été observées très précocement et la floraison s’est déroulée promptement pour tous les cépages ; le stade "pleine floraison" moyen étant enregistré au 1er juin.

Des températures douces et un ensoleillement important ont favorisé le passage de ce stade et quelques gros orages ont apporté de l’eau, imprimant également un rythme soutenu à la pousse
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Des conditions sèches pendant la maturation, qui n’impactent pas la prise de poids des grappes

Le stade "début véraison" se profilant dès la fin juillet, tout risque de pertes conséquentes, liées à une forte attaque de mildiou sur grappes, s’écarte peu à peu.

Cependant, à ce stade et compte-tenu du peu d’eau tombé jusqu’alors et prévu sur les prochaines semaines, il est raisonnable d’envisager que le rendement final se situera plutôt dans la fourchette basse de la prévision, Les grappes sont belles, certes, mais sans pluies, leur capacité de grossissement devrait être limitée.

Avec le début du mois d’août, arrivent les premiers prélèvements "matu", nous permettant de constater que les poids de grappes sont loin d’être faibles. Avec 109 et 118 grammes, tous cépages confondus, les 6 et 9 août, 2018 se situe sur le podium des poids de grappes les plus importants, à ce stade, sur les 10 dernières années.

Evidemment, ce constat reste à nuancer en fonction des cépages et des réglons, le Pinot noir de la Côte des Bar est en-deçà de cette moyenne avec respectivement 96 et 105 grammes.

Pour autant, à cette période, des poids de grappes à la vendange inférieurs à la moyenne décennale, ne nous paraissent pas incohérents.

C’est sans compter sur une cinétique de prise de poids similaire à celle des dernières années, donc dynamique. Malgré les très faibles cumuls de pluie, dont certains bénéficient, les grappes grossissent bien ... voire très bien, en particulier celle du Chardonnay !

Si le dernier prélèvement "matu", le 23 août, donne un poids moyen de 141 grammes, nous sommes encore loin du pic des vendanges !
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A la vendange...

Des grappes gigantesques sont fréquemment rencontrées. Des poids record sont enregistrés pour les trois cépages. Nous estimons les poids finaux entre 125 grammes pour le Pinot noir de la Côte des Bar et 175 grammes pour le Chardonnay de la Côte des Blancs ! Le poids moyen tous cépages confondus est estimé à 150 grammes.

Nous réajustons donc, en début de vendanges, nos estimations et les rapprochons, finalement, de la fourchette haute de 18 000 kg/ha.

Une fois les raisins rentrés, nous avons adressé à nos correspondants de l’AVC une enquête visant à estimer les quantités cueillies et celles restées dans les vignes.
Ces informations, toujours très précieuses, nous ont permis de confirmer nos chiffres : le rendement agronomique retenu sur l’aire d’Appellation est de 18 200 kg/ha. Un chiffre plutôt inhabituel ces dernières années, surtout dans un contexte de baisse des rendements.

Non seulement les vignes ont été particulièrement généreuses et ont offert une profusion de raisins en 2018, mais le climat extrêmement clément de l’année a également permis de remplir les caves de moûts qualitatifs. De quoi se réjouir à plus d’un titre et repartir sur de très bonnes bases en 2019.

Le Vigneron Champenois novembre 2018