UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

La Femme & le Champagne

Frivolité

Calaf, le héros de « Turandot » de Giacomo Puccini, chante au 3e acte : « L’amour naît avec le soleil ». Pour la femme, l’amour naît avec le champagne qui, comme lui, est un miracle ! Il est pour elle un merveilleux stimulant de ses instincts érotiques. Amaury de Cazanove le proclame dans « Les Chevaleresques » :

Avant de le boire, respire
O vierge, ce vin enjoleur
Tu ris ?... C’est l’amour qu’on aspire
Dans son parfum de vigne en fleur.

Il n’y a pas d’amour sans plaisir ; le champagne, vin de la joie, est aussi celui du plaisir intime, donné, reçu, partagé.
La connotation érotique de l’image du champagne est si forte qu’elle a toujours été véhiculée par les lettres. Nous l’avons vu au XVIIIe siècle dans femmes & champagne : Histoire. Dans le « Nouvel Almanach des muses pour l’an grégorien 1809 » V. Vastey, homme de lettres haïtien, a écrit un long poème allégorique intitulé « Origine du vin de Champagne », origine qu’il attribue à une goutte du sang de Cupidon tombée dans la vallée de la Marne, ce qui n’est pas plus fantaisiste que de la porter au crédit de Dom Pérignon, avec cependant la particularité que le champagne est né de la perception collective d’un phénomène naturel et non surnaturel. En voici un extrait qui illustre bien les vertus érotiques du champagne.

Cette liqueur pétillante et mousseuse,
Du sang sacré conserve la vertu.
Elle fait naître une ardeur amoureuse ;
Quand on la boit, le cœur sage est vaincu,
Le cœur timide est rendu téméraire ;
Puis elle éloigne à l’instant la fierté,
Et la prudence et la raison sévère,
Pour ne laisser que la légèreté.

Le champagne apporte raffinement et volupté dans les relations amoureuses si chères à la femme. Il pétille de joie et il lui procure une douce euphorie. Il est le vin de l’amour et les Américains l’ont si bien compris qu’ils appellent « erotic sigh », soupir érotique, le bruit qui résulte de l’ouverture discrète de la bouteille. Comme l’a joliment écrit Gyp, femme de lettres fort connue à la fin du XIXe siècle, en réponse à un « Questionnaire sur le vin de Champagne » :

Il fait glou, glou sortant de la bouteille,
Il fait pan, pan à la porte du cœur,
Et la beauté, qu’elle soit jeune ou vieille,
Reçoit l’amant, pardonne ses ardeurs.

« Champagne, vin de l’amour », proclame aussi la couverture d’une chanson de la même époque, créée par Marius Richard à la Scala ; elle porte comme titre « Vive le vin de l’amour » et l’illustration de Donjean représente un cabinet particulier avec un noceur, bouteille de champagne en main, tenant sur ses genoux une jeune femme brandissant la coupe qu’elle vient de vider et qui sera bientôt remplie.
Dans la vie et dans la fiction, le champagne est le roi de la séduction, l’arme idéale du séducteur mais aussi de la séductrice ; ayant toujours besoin de se rassurer sur son pouvoir de plaire, la femme est reconnaissante au champagne du pouvoir de séduction qu’il lui confrère. Comme l’a dit un jour de façon péremptoire une jeune et jolie journaliste de Suisse reçue pour une visite de la Champagne, « avec le whisky, on ne peut pas séduire une femme, avec le champagne c’est chose aisée ». On peut d’ailleurs constater que le plus souvent les hommes boivent du whisky ou de la bière quand ils sont entre eux mais du champagne quand ils sont accompagnés de femmes désirables. Dans les pays latins, en particulier, l’homme aime paraître, faire l’étalage de sa richesse, et il séduit l’élue de son cœur qu’il a invitée à dîner grâce à la mousse pétillante, non pas du mousseux local, mais du champagne, dont il fait apporter une bouteille sur la table avant le début des opérations, ainsi facilitées.
De toute façon, pour la conquête amoureuse, rien ne remplace un repas aux chandelles en tête-à-tête, avec le champagne comme une boisson exclusive ; et pour avoir davantage de femme, émotive par nature, sera certainement sensible à la magie du champagne et aux attentions de celui qui le lui offre. La recette est ancienne. Voici ce que l’on pouvait lire en 1815 dans « Les Soupers de Momus » sous la plume de Casimir-Ménestrier :

L’Amour, fin matois,
Veut-il dans un bois
Mettre sans carquois
Fillette aux abois ?
Il s’arme en sournois
D’un vin champenois.
Bouchon et minois,
Tout saute à la fois.

A la fin du tête-à-tête la femme aura oublié ce que ce déploiement de luxe tentateur avait d’artificiel et, le champagne aidant, elle se penchera sur les traits et les pensées de son commensal : elle sera séduite.
Si la séduction mousseuse est généralement le fait de l’homme, la femme, de plus en plus, prend les devants. Dans « Le Deuxième sexe » Simone de Beauvoir en convient, écrivant même à son sujet que « la sexualité joue dans la vie humaine un rôle considérable ». Loué soit le champagne qui permet à la femme de satisfaire ses penchants érotiques !
Les femmes se mettent en valeur pour leur propre plaisir mais, sauf exception, pour séduire les hommes. C’est pour eux qu’elles suivent les modes charmeuses des différentes époques, décolletés plongeants ou pigeonnants, port d’un corset ou d’une ceinture accentuant le dessin des hanches et celui du buste, profondeur des dos nus, robes fendues, minijupes, vêtements transparents, dentelles des dessous se laissant entrevoir, bretelles fines qui glissent négligemment, nombril apparent entre le tee-hirt et le pantalon. S’y ajoutent des détails romantiques, broderies et dentelles, des foulards et des fourrures, des coiffures bien choisies, toison tombant sur le dos ou nuque dégagée, mêches folles, queue de cheval, tresses juvéniles, accroche-cœur, un détail qui porte bien son nom. C’est aussi pour séduire que les femmes se fardent, certaines cependant gardant leur visage à l’état de nature, sachant que s’il est beau, les hommes le préfèrent ainsi, sans l’apport artificiel de rouge, bleu, vert... Quand une femme veut séduire celui qui sera peut-être l’homme de sa vie, elle met donc en œuvre tous ses atouts extérieurs mais elle fait aussi appel au champagne, le vin de l’amour, qui pourra avoir à lui seul un effet décisif. Sa caresse dans la bouche et l’ivresse légère qu’il procure ne figurent par au Kama-Sutra mais il le mettra en condition et après quelques verres il deviendra le séducteur, et ceci d’autant pius sûrement que la boisson divine aura enjolivé le teint et fait briller les yeux de sa partenaire qui, le regard étant la projection majeure du désir, se sentira plus séduisante que jamais. C’est si bon pour une femme de se savoir désirable pour celui qu’elle veut prendre dans ses rets et de voir se réaliser, grâce au champagne, ce qui n’était jusque là qu’un rêve amoureux.

Le champagne est ainsi l’artisan de la séduction réciproque, préliminaire indispensable à l’union spirituelle et charnelle. Dans son livre « L’Un est l’autre », Elisabeth Badinter affirme fort justement que « l’entente des corps est subordonnée à celle des cœurs qui devient la grande aventure du couple ». Comme tous les vins, le champagne est un psychotonique et son alcool intervient dans l’éclosion du désir en engendrant l’euphorie mais en raison de l’action du gaz carbonique celle-ci est particulièrement rapide. Il est donc le maître du prélude amoureux. Un verre peut parfois suffire mais il en faut d’ordinaire davantage. Dans « Mes Cahiers », Maurice Barrès fait dire par une jeune femme à un séducteur qui lui faisait des avances : « J’aime mon mari et je vous préviens que je suis très froide. Qu’il y ait beaucoup de champagne, sans cela je ne pourrai jamais ».

Pour aider les humains au jeu de la séduction, le champagne a tous les atouts, sa mousse, baiser sur les lèvres prometteur de tous les bonheurs, ses bulles polissonnes et ses reflets équivoques, sa saveur qui émoustille les sens. Il apporte plus de vivacité à l’esprit et il appelle la tendresse. Il procure une gaieté joyeuse et communicative. Il donne un sentiment de bonheur générateur de confiance en soi et d’optimisme qui rend l’homme audacieux et la femme réceptive. Il est la garantie de leur amour réciproque qui sera peut-être platonique mais aussi érotique. Comme l’a écrit Jean-Paul Kauffmann dans « Voyage en Champagne », le champagne peut être considéré comme « le jaillissement du liquide séminal tant il est vrai qu’il est riche de métaphores et d’images symboliques ». Et ceci nous ramène au « nectar charmant sautant sous ces beaux doigts » du poème de L’Attaignant.

Autre atout du champagne dans le jeu de la séduction, il rend la femme qui le boit, comme nous l’avons vu, plus belle et plus séduisante, ce que Diderot a fort bien explicité dans « Jacques le fataliste et son maître ». Jacques et son maître se sont arrêtés dans une auberge dont la patronne a remonté de la cave deux bouteilles de champagne. « On but quelques rasades les unes sur les autres pour s’assurer de la sagesse de la bouteille ». Jacques dit alors à son maître « Notre hôtesse a été belle comme un ange », et celle-ci de s’exclamer : « Monsieur Jacques, mon vin de Champagne m’embellit à vos yeux ». Yves Gandon le confirme également dans « La Ville invisible » où il écrit : « Elle but une coupe, deux coupes de champagne. Elle n’avait jamais paru si séduisante ». Pour tout dire, le champagne rend la femme plus sensuelle. Dans « L’Année des méduses », Christopher Frank en témoigne par cette simple phrase : « Barbara, sous l’effet du champagne, se faisait lourde, et langoureuse ».

De même que dans « Le Deuxième sexe » Simone de Beauvoir a écrit : « On ne naît pas femme, on le devient », on pourrait dire que la femme s’attache au champagne quand elle découvre qu’il est le véhicule de l’amour. Ce précieux liquide efface en effet les différences et aide à mieux se connaître, à construire à deux un bonheur qui de l’intimité atteindra peut-être l’érotisme. Il a ému la femme et décidé l’homme ; il est l’image du plaisir partagé. Après quelques verres, la plus réservée devient séductrice, sans que pour autant, compte-tenu du caractère généralement passif de l’érotisme féminin, il en résulte obligtoirement une liberté sexuelle même si le libertinage, contraire aux bonnes mœurs, sait se faire oublier dans le champagne. Lorsque le couturier Paul Poiret donna en 1912 à Versailles une « Fête Louis XIV », Isodora Duncan, raconte-t-il dans ses mémoires, lui réclamait du champagne et des baisers, pas davantage. Et quel plaisir ! proche de l’extase, pour la femme qui vient de découvrir le vin de l’amour et qui admire la valse des bulles et la teinte de cette merveille qui, selon la cuvée et son âge, a toutes les couleurs des bois en automne, or gris ou vert, jaune paillé ou ambré, vieil or, rose tendre ou tirant sur le pourpre, et qui ensuite ressentira les effets de ce breuvage dont George Sand disait qu’il « aide à l’émerveillement », qui exalte, charme, étanche la soif de bonheur et fait naître l’ardeur amoureuse. « L’esprit libre enfin au milieu de ses fers vole avec le champagne » écrivait le cardinal de Bernis dans une épitre.

Personne n’a mieux parlé du désir érotique provoqué par le champagne que Guy de Maupassant dans ce paragraphe de « Bel-Ami » : « Ils buvaient de temps en temps une gorgée de champagne et la pensée de l’amour, lente et envahissante, entrait en eux, enivrait peu à peu leur âme, comme le vin clair, tombé goutte à goutte en leur gorge, échauffait leur sang et troublait leur esprit ». Le vin de l’amour illumine la vie affective et sublime les unions qu’il entretient dans une euphorie toujours active. Pour Tchekhov, « quand une femme s’engage sur la pente savonnée, elle commence toujours par boire du champagne, parce qu’il siffle comme le serpent qui tenta Eve ». Et la fille d’Eve succombe souvent à la tentation. Même très pure, très sage, elle aspire, sciemment ou non, à rencontrer un jour l’amour. Le champagne, en faisant surgir le mythe enchanté du premier désir, en fait une séductrice. Elle a d’abord besoin de mieux connaître celui qui le lui a versé dans l’ambiance capiteuse d’un tête-à-tête ou d’une soirée et qu’elle observe avec un regard déjà captivé. Il peut s’ensuivre une simple entente amicale et sentimentale mais le plus fréquemment le champagne s’emploiera à attiser le feu de la passion.

La femme est soumise par sa nature au mâle protecteur et géniteur et elle attend de lui qu’il satisfasse les besoins de ses sens. En jouant son rôle d’entremetteur pétillant le champagne contribue à la réalisation de ses rêves de la manière la plus agréable. Avec lui, au lieu d’être prise brutalement par un séducteur elle jouira du déroulement progressif et merveilleux d’une rencontre qui, de sentimentale, deviendra amoureuse. C’est pourquoi elle s’abreuve avec joie, comme la fleur de la rosée du matin, de ce vin effervescent qui promet la venu d’Eros et le bonheur. Le champagne stimule l’esprit et les sens. Le docteur Tran-Ky et le docteur Drouard, précisent dans « Les Aphrodisiaques » que le champagne fait revivre les souvenirs et crée un climat propice à l’érotisme. Ils écrivent que « l’humeur et le caractère du moment interviennent de façon significative dans la création du désir » et que « c’est sous cet aspect qu’agissent certaines substances aphrodisiaques, telles que le diabolique champagne ! »

Le champagne est donc un aphrodidaque, ce qui est la confirmation du titre qu’on lui donne de vin de l’amour, et un aphrodisiaque d’un emploi plus aisé et d’un effet plus fiable que la corne de rhinocéros ! En outre, contrairement à certains produits destinés aux hommes uniquement, il profite à la femme.
Dans leur ouvrage « Vin de Champagne et émotions » les docteurs Tran-Ky et Drouard ont traité du mécanisme du désir et de sa relation avec le champagne. Le désir n’est pas un réflexe banal, mais le fruit d’une décharge des hormones et de certaines substances chimiques des glandes et du cerveau. Parmi ces molécules, les hormones surrénaliennes, la dopamine, la noradrénaline, l’acétylcholine et, découvertes récemment, la bétacarboline et la gonado-carboline, sont susceptibles d’être activées par les éléments aromatiques du champagne, vin qui détient le pouvoir de les rendre plus efficaces en freinant les circuits inhibiteurs. Il influe ainsi favorablement sur les endorphines déchargées par certaines cellules nerveuses qui tendent à affaiblir la vigilance tout en augmentant la perception sensorielle. Il le fait aussi en élevant par ses constituants aromatiques la sensibilité de ces cellules, en accentuant la fluidité de leur membrane, là où se produit précisément la réception des messages chimiques. Il rend ainsi la femme sensible aux moindres suggestions érotiques des hormones de son organisme.

Comme on l’a vu, les vertus thérapeutiques du champagne ont en outre l’immense avantage de se développer rapidement en raison de son gaz carbonique et d’avoir un effet tonique sur le cerveau plus rapide que celui des autres jus de la grappe. Il a la prérogative de transcender jusqu’à la passion les premiers gestes érotiques.
Le contact physique qui peut s’établir dans des transports amoureux entre le champagne et le corps de la femme est même pour elle particulièrement érotique. Les substances vasodilatatrices du champagne dilatent les capillaires superficielles, font saillir les mamelons et rosir leurs auréoles. Béranger en était bien conscient lorsqu’au début du XIXe siècle, mettant en présence le champagne et les amants de sa chanson « La Bacchante » il écrivait ces vers :

Dieux, baise ma gorge brûlante
Et taris l’écume enivrante
Dont tu te plais à l’arroser.

Quel bonheur pour la femme de disposer avec le champagne d’un aphrodisiaque naturel qui pris à dose raisonnable est sans danger et qui est tellement plus sain et agréable que les drogues douces ou dures, qui anihilent le sexe au lieu de le vivifier. Une jeune actrice anglaise qui les utilisaient dangereusement les a abandonnées pour le vin de l’amour et elle déclare depuis à qui veut l’entendre que ce que la France fait de mieux, c’est le champagne !
Le meilleur auxiliaire de l’amoureuse va-t-il trop loin ? Brillat-Savarin disait que « le bordeaux fait penser à des bêtises, le bourgogne fait dire des bêtises, le champagne fait faire des bêtises ». Avec ce dernier, le comportement de la femme peut devenir actif-érotique. La drague n’est pas l’apanage de l’homme et l’initiative en matière de luxure vient d’elle plus souvent qu’on ne le croit. La bacchante de Béranger en est un exemple quand elle dit :

De champagne enivre Julie.
Inventons, s’il se peut, des plaisirs
Des amours épuisons la folie.

Et aujourd’hui, dans « Chassé-croisé pour OSS 117 » Jean Bruce fait dire par Geneviève à Hubert Bonisseur de la Bath : « Je veux que tu me fasses l’amour... C’est toujours comme ça quand je bois un peu de champagne ».
Le champagne, on l’a vu, libère les inhibitions et lève les interdits. Ils peut parfois mener les femmes aux excès et au dévergondage car il développe leur imagination, aussi fertile que celle de l’homme, et il leur inspire les plus ardentes fantaisies. Les écrivains se sont emparés de ces débordements et dans les romans contemporains ce sont souvent de très jeunes filles qui sont représentées dans des situations scabreuses dues au champagne, la Nadine de Simone de Beauvoir dans « Les Mandarins » en étant l’archétype.

Dans « La Villa Golitsyn » de Piers Paul Read, Helen « lape le champagne dans une soucoupe comme un chat tandis que Simon se recule pour admirer le tableau vivant, la gamine nue à quatre pattes devant la fenêtre ouverte, toute rose dans le soleil couchant ».

Et si la femme a quelque remords de ses initiatives érotiques, elle les met sur le compte du champagne. « Rosemary, écrit Alison Lune dans « Liaisons étrangères », qui est très impulsive, se laisse souvent aller à des écarts sexuels qu’elle évoque ensuite en riant par des phrases comme : — C’était sûrement à cause du champagne ». Mais le plus souvent la femme lui est reconnaissante du plaisir que les bulles lui ont offert et... elle fait de nouveau appel à elles. Dans « femmes », de Philippe Sollers, le champagne couronne la phase ultime de la séduction et après l’amour l’héroïne dit simplement : « Je reprendrai bien un peu de champagne ». Il est vrai que ce vin, on le sait, apporte des éléments minéraux et énergétiques pouvant hâter la récupération et aider au renouvellement de l’accouplement. Bien sûr, le résultat n’est pas toujours positif ; il peut même être négatif si la femme l’a bu en trop grande quantité. Mais elle aura eu au moins le plaisir de s’en délecter.

Il semblerait, d’après la littérature tout au moins, que le champagne soit apprécié par les lesbiennes pour son rôle aphrodisiaque. Cela n’aurait rien d’étonnant car dans tout débat érotique le champagne est susceptible de jouer son rôle de vin de l’amour. Paul Margueritte en fait état dans « La Garçonne », Violette Leduc dans « La Bâtarde ». Quant à Françoise Parturier, elle décrit dans « Calamité, mon amour » une Suédoise, Sonia, qui jette son dévolu sur une Danoise qui dans un restaurant occupe une table voisine de la sienne : « Tenant à deux mains sa coupe qu’elle basculait doucement, elle fixait les bulles qui s’en échappaient et ne relevait les yeux que pour regarder sa voisine ». Un peu plus tard, « Sonia ne se contentait plus de regarder sa voisine de manière provocante, entrouvant la bouche, elle caressait lentement de sa lèvre inférieure le bord de la coupe. La jeune femme trempa son index dans son verre et de son doigt mouillé fit doucement le tour de ses lèvres ». Le soir, elles couchaient ensemble, après avoir fait monter une bouteille de champagne. On peut citer aussi Laure Adler qui, dans « Histoire des maisons closes sous la IVe République », explique que « lorsqu’une des pensionnaires avait conquis le cœur d’une de ses compagnes, elle commandait deux bouteilles de champagne, dont elle plaçait ostensiblement l’une devant son amie, l’autre devant elle-même ».

Quoi qu’il en soit, le champagne est un vin parfaitement conjugal. Il stimule la passion et c’est fréquemment lui qui, au hasard d’une rencontre, provoque l’hymen, scellant l’amour des futurs époux par le contact de leurs lèvres qu’il a mouillées de sa rosée ardente. Dans « A History of champagne », l’Anglais Vizetelly a écrit : « Comme agent matrimonial, les résultats obtenus par le champagne dépassent ceux de la plus habile des marieuses ». Le vin de l’amour sera toujours associé aux unions maritales comme il l’a été depuis longtemps ; au XIXe siècle, des cuvées leur étaient consacrées ; il y en avait une par exemple, pour le marché anglais, portant une étiquette ornée de deux cœurs et de deux colombes et intitulée « Nuptial sparkling champagne ».

Nous avons vu le rôle du champagne au cours des festivités de la journée du mariage. Il peut aussi être utile pour la nuit de noces.

Il peut même être mis à contribution d’une manière coquine. Il existe une tradition en Champagne selon laquelle le garçon d’honneur pénètre dans la chambre nuptiale avec un pot de chambre dans lequel a été versé une petite quantité de vin blond, que les époux doivent boire jusqu’à l’apparition au fond du vase de l’œil qui y a été peint. Plus sérieusement, compte-tenu de ce que le champagne accentue les réactions sexuelles en amplifiant la sécrétion neuroendocrinienne, comme dans le monde entier les nouveaux époux en boivent le jour de leur mariage et parfois en outre avant de se mettre au lit ; même si l’homme est timide et la femme frigide, leur union s’en trouvera facilitée.

Si le champagne reste ensuite une des boissons courantes du ménage, il maintiendra entre les deux époux des tendres liens et donnera tort aux Suisses qui dans leur majorité, selon une enquête de marché, estiment que lorsqu’un homme en boit en compagnie d’une femme, celle-ci n’est pas son épouse ! Quand une femme est véritablement amoureuse de son mari, elle s’identifie à lui et ses goûts deviennent les siens. Si il aime le champagne, elle l’aime aussi et c’est sa marque habituelle qu’elle préfère, à moins que son époux, par amour, ne se range à ses goûts. Durant toute leur vie mari et femme auront de nombreuses occasions de boire le breuvage magique. Avec lui ils fêteront des anniversaires ou, tout simplement, ils passeront ces moments enchantés qui font la solidité des ménages.

Quoi qu’il en soit, il n’est nul besoin que la femme soit l’épouse ou la compagne d’un homme pour qu’elle apprécie, même jeune, l’effet érotique du champagne. Dans son autobiographie, intitulée « Tant que dure le jour », Susan Travers écrit qu’à 17 ans elle s’est laissé faire la cour par un beau séducteur. Un soir, il lui apporte dans sa chambre deux coupes et du champagne (dont elle n’avait encore jamais bu). « Le temps que la bouteille soit vide, j’avais perdu ma virginité », confie-t-elle.