UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

Histoire du champagne

L’élimination du dépôt

On sait qu’au cours de la deuxième fermentation il se forme un important dépôt qui s’agglomère sur le flanc de la bouteille et qui est produit par des matières en suspension restées dans le vin de tirage malgré la clarification, par les levures dont les cellules se sont multipliées et par des précipités chimiques qui se sont constitués par suite des modifications du vin.

1. REMUAGE

Pour se débarrasser du dépôt, on procède dans un premier temps au remuage, qui se fait à la main ou à la machine, avec dans les deux cas le même objet : le rassembler sur le bouchon pour pouvoir ensuite l’expulser.
Pour que le remuage soit plus aisé, on peut comme autrefois déplacer préalablement les bouteilles et pratiquer le coup de poignet. Mais on dispose maintenant de facilités qui permettent de travailler sur un dépôt bien floculé et n’adhérant pas aux parois de la bouteille, à savoir des levures sélectionnées dans ce but et des adjuvants de clarification introduits au tirage et qui sont de même nature que ceux utilisés pour le collage.
Pour le remuage manuel, on procède à la mise sur pointe des bouteilles en les disposant dans les alvéoles des pupitres, initialement presque à l’horizontale, et on pratique le remuage dans des conditions décrites au chapitre 4 auquel on pourra se reporter. Il existe toutefois une différence importante avec ce qui se faisait autrefois : le dépôt adhérant moins aux parois de la bouteille, il n’est plus nécessaire, sauf cas très exceptionnels, de l’ébranler en secouant celle-ci. Le remueur se contente de lui imprimer un balancement : en la prenant à pleine main par le fond, il lui fait exécuter un brusque mouvement de rotation de 1/8 de tour, tantôt à droite, tantôt à gauche. Le premier jour du remuage, et parfois les jours suivants, le remueur peut se servir pour décoller le dépôt, si nécessaire, d’un instrument en fer, la crécelle, qu’il passe sur les bouteilles. A partir du 15e jour de remuage, on commence à relever les bouteilles tout en les tournant. Lorsque le dépôt a atteint l’épaulement, on les tourne toujours du même côté et on les relève plus vite, pour les amener graduellement à une position presque verticale, le dépôt étant alors entièrement rassemblé sur le bouchon. Avec le travail ainsi simplifié, un remueur peut traiter jusqu’à 60 000 bouteilles par jour. Il doit avoir une grande souplesse de poignet. Il travaille deux bouteilles à la fois, qu’il choisit dans des alvéoles du même rang, séparées par deux autres alvéoles. De la sorte, l’intervalle entre les bouteilles remuées correspond à la largeur de son torse et, le rang ayant six alvéoles, il traite en trois fois les six bouteilles du rang. Il se guide sur le trait de peinture blanche qui a été apposé sur le jable de la bouteille lors de l’entreillage.
Le remuage commence généralement deux semaines après la mise sur pointe lorsque, à la suite des manipulations que celle-ci a entraînées, la queue du dépôt est rassemblée sur le flanc de la bouteille. On suit les progrès du glissement du dépôt en mirant de temps à autre une bouteille, à la lampe électrique qui a remplacé la bougie d’autrefois. Le remuage se fait quotidiennement ou tous les deux jours ; sa durée, qui dépend aussi des particularités du vin traité, varie de 1 à 3 mois. Pour le remuage à la machine, dont les principes sont les mêmes, on voudra bien se reporter au chapitre 5, et pour l’élimination du dépôt dans les grandes et les petites bouteilles, au chapitre 6. Une fois le remuage terminé, les bouteilles sont mises en masse, toujours le goulot en bas, pour attendre le dégorgement qui peut intervenir sur-le-champ ou après un nouveau délai de vieillissement.

2. LE DÉGORGEMENT

Le dépôt étant rassemblé sur le bouchon, on s’en débarrasse en l’expulsant en même temps que ce dernier, que l’on libère avec l’aide de la pression intérieure de la bouteille dont il se perd environ une demi-atmosphère. Le dégorgement à la volée du XIXe siècle, avec pince de homard et guérite dégorgeoir, plus simplement appelée guérite, est toujours utilisé dans les petites exploitations. Dans les établissements importants, il est remplacé par le dégorgement automatique : les bouteilles, conduites par convoyeur à chaîne, sont ouvertes à la machine. Préalablement, mais ce peut être aussi le cas pour le dégorgement à la volée, le goulot de la bouteille est passé la tête en bas pendant quinze à vingt minutes dans un bac de congélation des cols. Le liquide qui se trouve dans le goulot en sort sous forme d’un petit bloc de glace emprisonnant le dépôt et expulsé avec lui. Outre ses avantages de facilité, permettant en particulier de redresser la bouteille sans disperser le dépôt, le dégorgement à la glace évite une perte de vin du fait que la pression interne est devenue moins élevée.