UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

Accueil > Encyclopédies > Anthologie du Champagne > E. Maumené

E. Maumené

Littérature du vin et de la table (1858)

TRAITÉ THÉORIQUE ET PRATIQUE DU TRAVAIL DES VINS

Le vin mousseux diffère du vin normal par la présence d’une grande quantité de gaz acide carbonique. [...1 Si l’on ouvre la bouteille [...] le gaz obéit à l’instant même à sa propre force d’expansion : il quitte, de toutes parts, le liquide où sa dissolution était exagérée : on le voit paraître en bulles innombrables qui s’élèvent à la surface et y forment pour un temps plus ou moins long cette écume, cette mousse pétillante dont le spectacle est un plaisir à tous les yeux. [...1

Le vin [...1 conserve, quand il est bien fait, de 5 à 6 atmosphères, et cela suffit pour produire une explosion et un pétillement considérables.

Le son de certains instruments de musique peut se faire sentir dans le verre, et son effet est très manifeste toutes les fois que les vibrations concordent avec celles que le verre peut produire. [...]

II y a des verres à fond rond, d’autres à fond pointu ; la mousse n’est pas la même dans les deux ; elle est plus vive dans les derniers. [...1 On peut, cependant, faire bien mousser le vin dans un verre à fond rond ; il suffit d’y développer quelques pointes ou aspérités : on y parvient, très aisément, en rayant le fond du verre avec une pointe d’acier. [...1

Lorsqu’on choque deux verres, comme pour trinquer, on produit un "bruit", mais non un "son musical". [...1 Si le liquide, après un repos suffisamment prolongé, ne contient plus de gaz "libre", et par conséquent plus de bulles, il reprend sa conductibilité régulière, et devient parfaitement sonore.

Les bouteilles [...1 sont très solides et très belles. Pour s’assurer de leur force et de la résistance qu’elles opposeront à l’expansion de la mousse, on emploie des "brise-bouteilles".

Lorsque le vin sur pointe a laissé tomber son dépôt, on procède au "dégorgement". [...] Le dégorgeur prend la bouteille sur un pupitre, ou dans des paniers qui la contiennent, toujours sur pointe, et la renversant sur son avant-bras gauche, il en détache le fil de fer, et les ficelles, au moyen du crochet ordinaire ; le bouchon commence à glisser, il le maintient avec l’index de la main gauche, et s’en rend maître, au moyen de la pince à dégorger ou "patte de homard". [...]

Parfois les bouchons se brisent, et ils ont acquis une telle dureté que le crochet et la pince ne suffisent pas à les arracher : le dégorgeur fait usage, en pareil cas, de la "machine à déboucher". [...1 Cette partie du travail est une des plus dangereuses : il arrive trop souvent de voir les bouteilles faire explosion dans les mains du dégorgeur et lui causer des blessures plus ou moins graves.

Aussitôt le bouchon appliqué sur la bouteille, il faut l’assujettir avec une solidité suffisante pour résister à une pression capable d’atteindre 8 athmosphères ; il faut que les moyens employés soient de nature à ne pas être aisément détruits par l’humidité des caves. Dans ce but, on l’attache avec deux ficelles et un fil de fer. [...1 L’agilité des ouvriers chargés de cette opération est on ne peut plus grande. Ils mettent la double ficelle à mille bouteilles par jour, quelquefois à 1.200.

1858’

1. La 2° édition date de 1874 et la 3e édition de 1890. Les trois éditions étant sensiblement les mêmes, on peut en déduire qu’il n y a pas eu de modifications importantes dans l’élaboration

du champagne entre 1856 et 1890.