UMC - Grandes Marques et Maisons de Champagne

Vendanges, de 2001 à nos jours

2022 - Des raisins de qualité dans des quantités généreuses

Après une année 2021 qui restera gravée dans la mémoire de tous les professionnels champenois avec les rendements les plus bas depuis près de 35 ans, la campagne 2022 tombe à point nommé avec des raisins de qualité dans des quantités généreuses.

METEO - UNE ANNEE SOLAIRE

Après le millésime 2021 durant lequel le soleil n’avait pas brillé par sa présence,
le millésime 2022 nous a offert un ensoleillement record, battant ainsi le record de 2018.

Un automne et un hiver assez classiques

Après la saison 2021 qui a été particulièrement humide, l’automne et l’hiver qui ont suivi n’ont pas présente de particularités bien définies.

Le mois d’octobre a été plus sec et légèrement plus frais que la moyenne, avec un ensoleillement assez présent ce qui a permis de faire perdurer le feuillage des vignes qui n’étaient pas trop touchées par le mildiou. Novembre a suivi la même dynamique.

Concernant l’hiver, il a commencé par un mois de décembre tout à fait dans les normales, suivi d’un mois de janvier légèrement plus frais que la moyenne et un mois de février chaud. Ces deux derniers mois ont été légèrement moins pluvieux que d’accoutumée en moyenne sur l’Appellation.

Un printemps sec

Le printemps 2022 aura principalement été marqué par la sécheresse qui aura débuté dès le début du mois de mars. En moyenne, il n’a plu que la moitié d’un printemps classique de mars à mai 2022. De plus, la majorité des précipitations ont été enregistrées durant la première décade d’avril, qui a également été la plus froide du printemps. Ce printemps n’aura pour autant pas été le plus sec jamais enregistré en Champagne. Le printemps 1976 reste le plus sec, suivi de 2012 puis 2014 et 2022 arrive en 4e position.

Même s’il ne s’agit pas d’un record, le fait que 3 des 4 printemps les plus secs enregistrés se sont déroulés sur les 10 dernières années est préoccupant.

Les températures, quant à elles, sont assez nettement au-dessus des normales. La fin mars et surtout la mi-mai ont été très nettement au-dessus des normales.

Le premier épisode de douceur fin mars a forcé la végétation. Le Chardonnay a commencé son débourrement mais a très rapidement été stoppé par un épisode de gelées assez dévastateur début avril. Les dégâts sont sans aucune mesure avec celles de 2021 mais près de 3 000 hectares ont été détruits tout de même. Au-delà des dégâts, ces gelées ont calmé la végétation qui ne commencera à se réveiller qu’à la mi-avril.

Les températures nettement plus douces qui ont suivi et notamment celles de mi-avril, ont contribué au dessèchement rapide des sols et à la mise en place d’une contrainte hydro-azotée sur la végétation.

L’été 2022 : un mois de juin en sauveur et un soleil omniprésent

Après ce printemps particulièrement sec la vigne avait besoin d’eau. Comme en 2020, c’est le mois de juin qui a apporté la majorité des précipitations de l’été. Elles ont pris la forme d’averses et d’orages assez peu intenses, parfaits pour l’infiltration dans le sol et l’alimentation de la plante en eau. Seul un orage a été grêligène touchant un axe allant de Channes à Rizaucourt-Buchey.

Ces précipitations sont d’autant plus importantes que les mois de juillet et août ont été très peu pluvieux (43 mm en moyenne sur l’Appellation), soit à peine 5 mm de plus que juillet-août 2020 qui avaient été les plus secs enregistrés avec 38 mm ). Le mois de juin, avec ses 100 mm en moyenne sur le réseau, a donc été salvateur pour la vigne en apportant de l’eau au moment le plus opportun.

A noter également, les précipitations du mois d’août, dont la majorité est survenue aux alentours du 15 et qui ont permis d’assurer une bonne dynamique de maturation des baies.

D’un point de vue températures, si l’on exclut la dernière décade de juin et la première de juillet, les normales ont été dépassées systématiquement.

En moyenne, l’été météorologique 2022 (juin-août) est le 3e plus chaud enregistré en Champagne après 2003 et 2018 avec 20,6 °C. Ceci est à noter car la tendance d’été de plus en plus chauds se confirme. Pour rappel, la moyenne de température d’un été standard il y a 30 ans était de 17,7 ° C, la moyenne décennale actuelle est de 19,5 ° C.

En termes de jours de chaleur, le nombre de jours ayant dépassé 25 °C est de 68 jours soit le plus élevé devant 2003 avec 67 jours. Le nombre de jours au-dessus de 30 ° C est lui le second après 2005 mais avec une température maximale absolue sur l’année de 41,3 ° C soit la 3e la plus élevée après 2019 et 2003. 2022 aura donc présenté un été particulièrement chaud.

L’autre fait marquant de cet été 2022 a été son ensoleillement. Déjà au printemps, le soleil brillait. Le mois de mai avec 288 heures de soleil est près de 70 heures au-delà des normales, le mois de juin malgré la pluie est également plus ensoleillé. Le mois de juillet lui vient littéralement exploser la moyenne avec 350 heures d’ensoleillement soit presque 100 heures de plus qu’un mois de juillet normal et 15 heures de plus que le précédent record de juillet 2013. Enfin, le mois d’août est également très largement excédentaire avec 294 heures d’ensoleillement ce qui le place comme 4e mois d’août le plus ensoleillé.

Si l’on fait le bilan de l’ensoleillement de l’été 2022, c’est sans surprise qu’il se positionne comme l’été le plus ensoleillé jamais enregistré avec 915 heures, soit presque 200 heures de plus qu’un été lambda et 60 heures de plus que son dauphin l’été 2018. A noter également que l’été 2022 n’est que le quatrième à dépasser les 800 heures.

Au-delà de l’été, la période de janvier à septembre 2022 cumule déjà 2 023 heures d’ensoleillement (pour référence, Toulouse possède un ensoleillement moyen annuel de 2 030 heures) soit 122 heures de plus que l’ensoleillement moyen annuel !

Il ne semble donc pas aberrant de parier dès aujourd’hui que l’année 2022 battra le précédent record d’ensoleillement annuel détenu par 2018 avec 2 172 heures. Le tableau ci-dessous résume les conditions de l’été (juin-août) 2022 en moyenne sur la Champagne.

Paramètres2022Normale
Température moyenne 20,6 °C (+1,14 °C) 19,46 °C
Température maximale (°C) 27,43 °C (+ 25.01 °C) 25,42 °C
Nb jours avec tmax supérieure à 25 °C 68,64 j (+ 22,22j) 46,42 j
Nb jours avec tmax supérieure à 30 °C 23,53 j (+ 8,06 j) 15,47 j
Pluviomètre (mm) 143 mm (- 18 %) 174,6 mm
insolation (heures) 915,6 h (+ 26 %) 725,4 h

Ce qui ressort est bien évidemment la température qui est très largement supérieure aux normales que ce soit pour la température moyenne, la température maximale, le nombre de jours supérieurs à 25 °C qui est un record et le nombre de jours supérieurs à 30 °C.

Mais la variable la plus marquante, voire impressionnante est l’insolation avec pour la première fois plus de 900 heures de soleil.

La campagne 2022 aura donc été marquée d’une part par son côté solaire avec un ensoleillement record. En parallèle, les précipitations qui ont clairement manqué mais heureusement le mois de juin assez pluvieux est venu tamponner ce qui aurait pu être une catastrophe.

Malgré des gelées en tout début de saison, les températures de la saison 2022 sont marquées par la chaleur qui pour autant n’aura engendré que peu de dégâts d’échaudage.

Comportement hydrique des sols - Un mois de juin salvateur

Après un millésime 2021 particulièrement humide, l’hiver 2021-2022, assez peu pluvieux, n’a pas empêché les sols d’être rechargés pour débuter cette année. Cependant, la tendance de l’hiver s’est amplifiée durant le printemps avec très peu de pluie et des conditions très évaporantes du fait de l’ensoleillement omniprésent. Très rapidement, des symptômes de stress hydro-azoté ont été visibles dans le vignoble. Heureusement, le mois de juin a apporté des précipitations plus que bienvenues qui ont permis de limiter les dégâts, particulièrement dans les zones où les réserves utiles sont les plus faibles. Ont suivi des mois de juillet et août très peu pluvieux qui ont énormément fait baisser les réserves en eau. Mais encore une fois, des précipitations bien placées ont permis d’éviter les blocages de maturation dans la majeure partie du vignoble.

Météo des sols

La météo des sols qui nous sert à étudier l’itinéraire hydrique de la vigne est en fait un modèle de bilan hydrique développé par l’INRAE (formule 1). Ce modèle permet d’estimer les quantités d’eau disponibles dans le sol pour la vigne, les résultats étant exprimés en pourcentage de la réserve utile. En début d’année, on considère que le sol est à sa capacité maximale de stockage de l’eau donc à 100 % de la réserve utile. Trois niveaux de réserve utile (faible, moyenne et forte) ont été définis grâce aux mesures réalisées par le Comité Champagne depuis plusieurs années. Ensuite, on soustrait à cette réserve utile l’évaporation du sol, l’évapotranspiration de la vigne et on ajoute les précipitations sachant que la limite maximale est à 100 % de la réserve utile.


ASWj=ASWj-1+Pj-ESj-TVj

ASW = Available transpirable Soi ! Water (eau restante dans le sol) (en mm)
Pj = pluie (en mm)
ESj = évaporation du sol (en mm)
TVj = transpiration de la vigne (en mm)
j = jour de l’année

Formule 1. Calcul du bilan hydrique.


Pour faire fonctionner ce modèle, nous utilisons des données climatiques qui sont fournies par les différentes stations météorologiques déployées par le Comité Champagne : pluie, température et évapotranspiration potentielle. Puis des mesures en cours de campagne permettent d’évaluer l’efficacité du modèle et de le recaler si nécessaire.

Il s’agit des mesures de potentiel hydrique foliaire de base. On prélève une feuille qu’on introduit dans une chambre à pression et on applique une pression d’air pour extraire la sève du pétiole. Plus la pression nécessaire pour extraire la sève est élevée, plus la contrainte subie par la vigne est importante. Cette mesure est effectuée la nuit car c’est le moment où la vigne ferme la majorité de ses stomates et rentre en équilibre de tension d’eau le sol. Cette mesure est en suite convertie en pourcentage de réserve utile grâce à une corrélation établie par l’INRAE. Puis compare cette mesure aux données fournies par le modèle et, si l’écart est important, on réajuste le modèle pour correspondre à la réalité du terrain.

Des mesures menées en 2016 ont permis de déterminer la réserve utile d’une quarantaine de parcelles à travers le vignoble champenois. A cette occasion, nous avons pu remarquer que la Côte des Bar présente des sols avec des réserves utiles plus faibles que les autres secteurs de la Champagne. Cela s’explique par la nature même des sols. En effet, les sols de la Côte des Bar sont majoritairement issus de l’érosion d’une roche mère Jurassique assez dure. Leur profondeur est donc, en général, assez limitée, ce qui ne permet pas de retenir beaucoup d’eau. Les sols du reste du vignoble sont majoritairement issus de la dégradation de roches mères du Crétacé ou du Tertiaire qui sont plus facilement érodables. Les sols sont donc majoritairement plus longs et peuvent ainsi contenir plus d’eau. Attention, cependant aux parcelles sur sables du Tertiaire car ces derniers sont particulièrement drainants et ne permettent pas de retenir de grandes quantités d’eau.

Bien entendu, cette description est très globale et ne permet pas de décrire finement la réserve utile des sols.

Itinéraire hydrique de l’année 2022

Après une saison 2021 particulièrement humide, les sols n’ont pas eu de mal à se recharger et atteindre la capacité au champ durant un hiver qui n’a pas été si pluvieux que ça. Cet hiver assez peu pluvieux a eu pour avantage de limiter le lessivage des nitrates dans le sol, ce qui aura une importance pour la suite de la saison.

En effet, à partir de la mi-mars les précipitations se font rares et les sols, notamment l’horizon superficiel, se dessèchent. Ceci n’a que peu d’impact sur le début du cycle végétatif car il y a tout de même de l’eau à disposition pour la plante et elle consomme ses réserves pour développer ses premières feuilles.

De plus, d’un point de vue "eau", les quelques pluies enregistrées en avril ont permis de commencer le cycle végétatif à des valeurs proches de la capacité au champ. Les sols se sont par la suite rapidement desséchés et sont arrivés à des valeurs comprises entre 50 et 80 % à mi-floraison.

A ce moment, la plante commence à récupérer les ressources du sol (eau et minéraux) pour continuer à se développer et le manque d’eau en avril et mai commence à marquer certaines parcelles.

La pression hydro-azotée se faisant sentir, il était important pour la suite de la saison que des précipitations arrivent rapidement.

Et ce fut le cas avec un mois de juin assez arrosé qui s’est révélé salvateur compte tenu des conditions extrêmement sèches et évaporantes qui ont suivi.

Sans pour autant faire remonter le bilan hydrique à des valeurs trop élevées, les pluies de Juin ont permis de limiter la descente vertigineuse qui était en cours.

Les conditions pluvieuses vont se maintenir jusqu’à début juillet. Par la suite des vagues de chaleur successives couplées avec un vent chaud et sec vont faire baisser les réserves en eau de près de 50 % en un seul mois. Alors que le mois de juin avait permis de rester dans l’itinéraire hydrique idéal, le mois de juillet a fait très rapidement basculer les sols vers des valeurs en dessous voire très largement en dessous.

Des symptômes de stress hydrique apparaissent au vignoble sur les sols les plus drainants ou les plus courts.

Arrivée à la période de maturation, la vigne se retrouve à des niveaux de contrainte qui oscillent entre les contraintes modérées et très fortes en fonction des zones.

La véraison a pu montrer, dans les zones les plus contraintes, une dynamique assez lente. En regardant la carte des bilans hydriques au stade mi-véraison (qui a été déterminé au 12 août cette année en moyenne), on peut voir que la partie septentrionale du vignoble oscille entre 10 et 20 % d’eau restante alors que la Côte des Bar est déjà en-dessous des 10%.

A partir de la mi-août, des précipitations d’ampleurs variables mais clairement bienvenues se sont abattues sur la Champagne. Dans un premier temps sur la Côte des Bar puis dans la Marne et enfin dans l’Aisne.

On peut voir que l’effet sur le bilan hydrique a été limité hormis sur une partie de la Côte des Bar. Ces précipitations, tombées à point nommé, ont permis un bon déroulement de la maturation.

Maladies et ravageurs - Une campagne sereine

Après une campagne 2021 particulièrement compliquée dans la plupart des petites régions du vignoble, 2022 marque le retour d’une année sereine, couronnée par une belle récolte.

Phénologie de la vigne

Après un hiver doux et humide, une fois de plus sans réelle période de froid, des conditions printanières se mettent en place dès février-mars, et favorisent la reprise de l’activité végétative. Selon les modèles physiologiques, le débourrement est annoncé dans la moyenne des dernières années, voire avec un peu d’avance. Finalement, un coup de froid début avril stoppe net les ardeurs de la végétation, et la date moyenne de débourrement retenue est le 16 avril, soit 3 jours de retard par rapport à la moyenne décennale.

En parallèle, les épisodes de gelées se succèdent au début du mois d’avril (du 1er au 4 avril, puis du 9 au 11 avril), souvent dans une atmosphère humide. Toutefois, la phénologie étant moins avancée qu’en 2021, l’intensité des dégâts au vignoble est nettement atténuée. Les dégâts seront finalement estimés à environ 8 % de perte, avec une grande hétérogénéité entre régions.

Une fois passé le coup de froid de la première décade d’avril, une hausse significative des températures permet enfin à la végétation, jusque-là stagnante, de se développer. Fin avril, les coteaux ont déjà nettement verdi. Les températures restent élevées et petit à petit, la phénologie rattrape le retard du débourrement et prend même de l’avance. Fin mai, une semaine d’avance est observée, et la vigne est en début de floraison.

Les températures deviennent alors un peu plus fraîches, et la dynamique en cours ralentit. La date moyenne retenue pour la floraison est finalement le 3 Juin, soit une dizaine de jours d’avance sur la moyenne décennale.

Les baies se forment, grossissent et le stade "grains de pois" se généralise au vignoble fin juin. L’avance est alors d’un peu moins de 15 Jours. Petit à petit, les grappes se ferment, puis le début véraison est observé durant la dernière décade de juillet. Le suivi matu débute le 8 août, et les vendanges démarrent fin août-début septembre.

Mange-bourgeons et pyrales, ravageurs toujours secondaires

Les premiers dégâts de mange bourgeons sont observés courant mars. Le coup de froid observé début avril et la stagnation de végétation qu’il engendre, font craindre une exposition prolongée des bourgeons aux mange-bourgeons et donc un grignotage très actif. Cependant, les températures fraîches semblent aussi avoir impacté l’activité des chenilles, qui paraissent un peu engourdies par le froid. Avec la remontée des températures et le redémarrage actif de la végétation, le risque "mange-bourgeons" est définitivement écarté dès la mi-avril. Au final, 72 % des parcelles du réseau SBT (Surveillance Biologique du Territoire) sont concernées par la présence de mange-bourgeons, et 8 % des parcelles atteignent le seuil de 15 % de ceps touchés, plaçant 2022 parmi les années à pression modérée.

Mi-avril, les observations "pyrales" prennent le relais des suivis "mange-bourgeons". Les premières remontées sont observées dans la foulée. Les températures sont douées voire élevées et la végétation pousse de manière continue. Tout au long de la période de suivi, qui s’étale jusqu’à fin mai, la pression "pyrales" reste plutôt faible. Un dernier bilan "pyrales" est établi fin mai : la pression 2022 est qualifiée de modérée, avec 84 % des parcelles concernées par la présence de pyrales et aucune parcelle au seuil de 100 % de ceps occupés sur le réseau SBT.

Une fois de plus, mange-bourgeons et pyrales restent des ravageurs secondaires à l’échelle du vignoble, même si ponctuellement, ils peuvent occasionner des dégâts.

Tordeuses encore discrètes, comme les années précédentes

Avril est traditionnellement le mois où les papillons de tordeuses de la grappe de première génération commencent à voler.

Le vol débute ainsi tranquillement le 19 avril, pour l’eudémis, puis un peu plus tard pour la cochylis. Le vol peine à s’intensifier, notamment pour la cochylis. Les premières pontes sont décelées début mai dans des parcelles hors confusion sexuelle situées en côte des Bar ou dans la région d’Epernay. Les pontes puis les glomérules restent rares à l’échelle Champagne, toutefois elles sont un peu plus marquées que ces deux dernières années. Les conditions météo ont été plus favorables aux papillons. Fin mai, le bilan de la G1 fait état de la présence de glomérules dans moins de 1 % des parcelles du réseau SBT, classant 2022 parmi les années à G1 faible.

Le vol de la deuxième génération (G2) des tordeuses débute vers le 20 juin et la surveillance des oufs démarre alors sur les différents réseaux. Les premiers œufs sont vus 3 Jours plus tard, dans des parcelles à historique "tordeuses" de la région d’Epernay, hors zone sous confusion sexuelle. De très rares œufs puis perforations sont ensuite observés (région d’Epernay, Barrais, Axonais). Concernant la G2, 2022 est aussi une année à pression très faible, même si très localement, comme lors de la 1regénération, une activité de ponte significative et donc une pression plus marquée ont pu être observées.

Concernant la technique de confusion sexuelle, elle est déployée sur près de 17 000 hectares dont près de 2 400 hectares via le dispositif de diffusion active par aérosol. Les aérosols ont été installés dans le but d’éprouver l’efficacité de ce nouveau mode de diffusion, dans le contexte champenois (vignoble de coteau, morcellement du parcellaire, vallées encaissées). Malheureusement, l’absence de pression "tordeuses" ces dernières années ne permet pas de tirer de conclusion.

Mildiou, année très calme

Le temps, resté globalement sec au printemps, n’a pas favorisé une acquisition particulièrement précoce de la maturité des œufs d’hiver du mildiou. Quelques averses et rosées matinales début mai permettent l’acquisition de la maturité, qui est observée au laboratoire durant la première décade de mai, soit presque un mois après le débourrement de la vigne. Le stade de réceptivité de la vigne est donc largement atteint.

Les semaines suivantes restent sèches. En conséquence, le potentiel d’agressivité du mildiou, modélisé avec le modèle Potentiel Système (S. Strizyk - version 2017) est faible en sortie d’hiver, et le reste quelques semaines. Il repart un peu à la hausse à partir de début juin, suite à quelques averses orageuses. Les premières taches sur feuilles sont vues durant la première décade de Juin. Elles restent très rares, et la phénologie de la vigne est déjà bien avancée, laissant d’ores et déjà présager un impact du mildiou faible sur la récolte, contrairement à l’année précédente. La situation n’évolue pas courant juin, ni durant le mois juillet. La pression reste très modérée et le vignoble très sain, avec seulement 18 % des parcelles du réseau SBT concernées par du mildiou sur feuilles au stade fin fermeture de la grappe-début véraison, et aucun symptôme sur grappes.

Au final, l’année 2022 se classe parmi les années à pression faible, très loin de 2021 qui est la pire année jamais enregistrée ces 30 dernières années au moins.

Une présence modérée de l’oïdium

Parmi les outils disponibles, le modèle "Oïdium Champagne", développé par la société Modeline (adaptation pour la Champagne du modèle bourguignon "Système Oïdium Vigne"), permet notamment de prédire le risque épidémique en sortie d’hiver. En 2022, le modèle calcule un potentiel épidémique en sortie d’hiver modéré. Les conditions météo semblent plutôt favorables à l’oïdium. La vigilance est donc de mise, l’oïdium est la priorité de la campagne.

Notre suivi de la maturité des cléistothèces, conduit en collaboration avec Moët & Chandon, montre une aptitude à l’éjection des ascospores, en condition de laboratoire, jusqu’à la mi-mai.

Les premières contaminations, dépistées grâce à des analyses biomoléculaires dès les tout premiers jours de mai, sont manifestement liées aux précipitations enregistrées du 23 au 26 avril.

La surveillance sur feuilles au vignoble est enclenchée vers le 10 mai, suite à l’identification des premiers événements contaminants et les prévisions de visualisation des symptômes à l’aide de l’abaque de latence de l’INRA. Les premières taches sont détectées à partir du 13 mai, en parcelles de Chardonnay à historique, puis dans quelques autres parcelles déjà touchées les années précédentes. Les symptômes restent peu présents. En période de floraison, l’indicateur régional "feuilles" classe l’année parmi les années à pression modérée.

La surveillance sur grappes prend ensuite le relais dès la mi juin, sur tous les cépages.

La proportion de parcelles concernées augmente petit à petit, de semaine en semaine, pour atteindre 11 % des parcelles du réseau SBT avec symptômes d’oïdium sur grappes au stade fin fermeture-début véraison. L’intensité reste toutefois généralement faible.

Au final, la pression est bien contenue, l’année 2022 se classe parmi les années à pression oïdium faible à modérée. Si quelques symptômes sont régulièrement observés, les quelques rares cas graves sont parcellaires.

Une superbe qualité de la vendange

Un léger frémissement, en termes de dégradations sanitaires, est relevé sur le réseau maturation à partir du prélèvement du 22 août, dans le Barrais. Mais les grappes altérées restent rares. D’une manière générale, les quelques grappes ou baies isolées pourries sont plutôt observées dans les parcelles de Chardonnay.

En cherchant bien, quelques nouveaux symptômes de pourriture apparaissent sur Meunier, dans les vignes et parfois dans les caisses, en fin de vendanges, à partir du 10 septembre.

La qualité sanitaire de la vendange 2022 est excellente.

Jaunisses : des prospections encore renforcées

Une fois de plus, et pour la 6e année de suite, les moyens mis en ouvre par le Comité Champagne, les DRAAF Grand-Est et Hauts de France, la Fredon Grand Est, avec l’appui des partenaires du groupe de Concertation Technique, pour déployer au vignoble les prospections collectives, obligatoires et réglementaires, sont sans précèdent.

Sans précèdent également, et très préoccupant, c’est la détection à l’automne 2021, dans deux communes champenoises (Trélou-sur-Marne et Vert-Toulon), de foyers de flavescence dorée contaminés par un variant très épidémique. Une surveillance renforcée est donc mise en place dès fin juin dans ces communes, par les techniciens, puis, pour la première fois, une pré-prospection précoce fin juillet est réalisée avec les vignerons.

Cette année, les surveillances collectives "jaunisses" ont été effectuées avant, et surtout après vendanges.

Les prospections collectives obligatoires ont d’abord démarré dans les communes des Zones Délimitées (ZD, ex-Périmètre de Lutte Obligatoire), là où des cas avérés de flavescence dorée avaient été détectés l’année dernière. Les trois départements principaux de l’AOC sont concernés, avec la ZD d’Arrentières dans l’Aube, la ZD de Trélou-sur-Marne/Passy-sur-Marne/Barzy-sur-Marne dans l’Aisne, et les ZD de Saudoy, Dormans/Courthiezy, Reuil/Binson-et-Orquigny/Villers-sous-Chatillon/Montigny-sous-Châtillon, Chouilly/Cuis/Pierry/Oiry/Cramant/Grauves/Mancy, de Mardeuil et de Trois- Puits/Montbré/Ludes/Taissy dans la Marne, soit au total 3 300 hectares de vignoble.

En parallèle, avec le Syndicat Général des Vignerons, les prospections collectives volontaires ont été organisées dans toute la Champagne : 103 communes ont été accompagnées. Chacune de ces prospections a rassemblé 15 à 50 vignerons, ce qui a permis de surveiller dans chaque commune 10 à 130 hectares, pour un total estimé à 3 850 hectares.

Ces prospections volontaires, étaient encadrées par les techniciens du Groupe de Concertation Technique champenois. S’ajoutent à ces surfaces surveillées collectivement, les signalements ponctuels menés par les professionnels (maisons et vignerons) sur leur exploitation.

Au global, on peut estimer les surfaces surveillées cette année à plus de 7 000 hectares. Conséquence : le nombre de signalements de ceps douteux est à la hausse, et 14 150 ceps ont été prélevés pour analyse, hors vignes-mères de greffons. A l’heure de la rédaction de cet article, des résultats de diagnostic au laboratoire (pour savoir si les ceps douteux "jaunisses" sont du bois noir ou de la flavescence dorée) sont encore attendus. Les résultats sont publiés au fur et à mesure que nous les recevons sur l’extranet professionnel.

Maladies du bois

Les notations effectuées sur 93 parcelles du réseau de surveillance biologique du territoire (SBT) aboutissent à une expression moyenne des maladies du bois cette année.

En résumé, l’empreinte des problèmes parasitaires sur le millésime 2022 est très faible.

Paramètres analytiques des raisins - Vers de nouveaux standards de maturation

A rapproche du mois d’août, le scénario de la maturation 2022 s’annonçait particulièrement incertain et les inquiétudes grandissaient quand au potentiel qualitatif de la récolte. En effet, les températures extrêmes sur le mois de juillet,
la sécheresse généralisée et la floraison hétérogène sur le Chardonnay combinées à des rendements importants, laissaient envisager de possibles blocages de maturité, des difficultés à établir les circuits de cueillette et des vendanges extrêmement précoces.

Finalement, et grâce à des précipitations bienvenues, la maturation des raisins s’est faite sereinement avec des paramètres analytiques comparables aux millésimes 2018 et 2020.

Le réseau matu et le portail collaboratif

Les parcelles du réseau matu officiel sont globalement stables entre 2021 et 2022. On comptait pour cette campagne 623 parcelles inscrites avec une distribution toujours représentative de l’encépagement réel à travers la distribution géographique et des cépages. Sur les 623 parcelles enregistrées, 521 ont fait l’objet d’au moins 1 prélèvement.

CépagesParcelles réseau matuEncépagement réel
Chardonnay 37 % 31 %
Pinot noir 37 % 38 %
Meunier 28 % 31 %
Distribution des parcelles du réseau matu selon les cépages

Les données du réseau officiel, qui existe depuis 1989, ont cette année été complétées massivement par les résultats saisis sur le portail collaboratif. Au total, ce sont 5 599 prélèvements qui sont venus compléter les résultats du réseau officiel qui comptabilise 2 043 prélèvements cumulés sur 6 dates du 8 au 25 août. Le portail collaboratif nous permet également de continuer de suivre la maturation au cours des vendanges grâce, cette année, à plus de 400 prélèvements saisis entre le 29 août et le 2 septembre.

Le portail collaboratif comptait cette année 1 187 parcelles, soit 666 parcelles complémentaires au réseau officiel. Toutefois, la distribution des parcelles enregistrées sur-représente le Chardonnay et sous-représente le Meunier par rapport à l’encépagement réel.

L’évolution des paramètres technologiques

Les premiers prélèvements sur le réseau officiel ont lieu le 8 août mais les premières saisies sur le portail collaboratif sont effectuées dès le 1er août pour les secteurs les plus précoces de l’Aube. Ces premiers résultats sont cohérents avec la phénologie observée plus tôt dans la campagne et les Taux d’Alcool Volumique Potentiel (TAVP) sont similaires à 2018 à la même date et en retard d’environ 5 jours par rapport au millésime 2020, Au prélèvement du 8 août, l’acidité totale est déjà basse mais reste supérieure de 3 points à 2018 à degré équivalent. Pour ce premier prélèvement, le TAVP moyen à l’échelle Champagne est de 6,2 % vol. Il semble donc
pertinent de maintenir le ban des vendanges au samedi 20 août.

A l’issue de la première semaine de prélèvements, entre le 8 et le 15 août, la prise de degré est dans la moyenne avec une augmentation journalière de + 0, 23, ce qui est supérieur à 2018 (+ 0,16) mais inférieur à 2020 (+0,31). Le Pinot noir de l’Aube est légèrement en retrait sur la cinétique avec une prise de degré d’environ 0,17/jour. Toutefois, nous notons que la prise de degré a tendance à ralentir entre les prélèvements du 11 et du 15 août ce qui nous fait craindre un scénario type 2020 avec des degrés qui stagnent à rapproche des vendanges. Nous constatons également une grande homogénéité des TAVP moyens pour les principaux couples cépage/département. A ce stade, toutes les moyennes se tiennent dans un écart de 0, 2 % vol. La chute d’acidité constatée sur cette première semaine est importante (-0, 85/jour) et comparable à 2020 à stade équivalent.

La semaine du 15 août marque également le retour des précipitations sur le vignoble. Ces pluies sont une aubaine sur les secteurs où les poids des grappes évoluaient peu et pour lesquels des phénomènes de blocage étaient envisageables. Les effets de ces précipitations se font ressentir dès les résultats du jeudi 18 août, les derniers avant les décisions des dates, La prise de degré est faible entre le 15 et le 18 août (0, 1/jour) mais le poids moyen des grappes explose sur les 3 cépages. Ceci nous confirme que la charge en sucres au niveau des baies est toujours dynamique et que la prise de degrés devrait reprendre la semaine suivante. Malgré les phénomènes de précipitations, très localisés qui auraient pu créer une certaine hétérogénéité dans les paramètres de maturité, nous constatons toujours des résultats très similaires entre cépages et départements. De plus, les écarts-types constatés sur le prélèvement du 18 août sont inférieurs à la moyenne des 5 dernières années sur les 3 cépages, ce qui témoigne d’une homogénéité supérieure à la moyenne y compris à l’échelle parcellaire.

Le retour du beau temps, à la suite des épisodes orageux, permet de reprendre une dynamique de maturation satisfaisante. Les TAVP moyens par cépage et département, au dernier prélèvement sur le réseau officiel le 25 août, sont toujours très homogènes et compris entre 9, 2 % vol. et 9,6 % vol.

Les acidités se sont également stabilisées et les niveaux d’acidité totale constatés au 25 août sont compris entre 7 et 8 g/L. Ces valeurs sont équivalentes au millésime 2018 à TAVP équivalent. L’année 2022 se classe donc parmi les millésimes les moins acides des 20 dernières années. Ces acidités faibles sont principalement portées par des quantités limitées en acide malique dès le début de la véraison. En effet, les températures élevées entre la nouaison et la véraison ainsi que la production limitée de jeunes feuilles sur cette période sont des facteurs qui limitent les teneurs en acide malique.

Les résultats de la cartographie des moûts confirment ceux obtenus au cours des contrôles de maturité avec une valeur d’acidité moyenne de 5,8 g/L sur les cuvées, soit 1,4 g/L de moins que la moyenne décennale (7,2 g/L).

Les pH sont également élevés avec une valeur de 3,11 à l’échelle Champagne contre 3,07 en moyenne décennale.

Quelle influence des rendements sur la maturation des raisins ?

Il était légitime en 2022 de s’interroger sur l’impact potentiel des rendements sur le déroulé de la maturation, dans un contexte où la ressource en eau pouvait s’avérer limitante dans plusieurs secteurs. Lorsque l’on observe les évolutions du TAVP par classe de charge (nombre de grappes par pieds) on constate une prise de degré très forte entre les deux premiers prélèvements pour la classe 6-10 puis une dynamique similaire à la classe 11-13. Les 2 classes de charge les plus importantes montrent un ralentissement fort de révolution du degré entre le 15 et le 18 août puis une reprise forte entre le 18 et le 22 août. Cette reprise est probablement liée aux précipitations
survenues autour du 15 août et ayant permis de relancer les flux vers les baies.

Au dernier prélèvement, les parcelles avec les charges les plus importantes présentent un retard d’environ 0,5 % vol. par rapport aux parcelles les moins chargées, soit un écart de 2 à 3 jours environ (résultat non significatif statistiquement). En revanche, nous n’observons pas de différences entre les classes 6-10, 11-13 et 14-16 à cette date.

Classe de chargeTAVPAcidité totale (g H2s04/L)
6-10 9,5 a 7,9 a
11-13 9,3 a 7,4 ab
14-16 9,4 a 7,7 ab
17+ 9,0 a 7,2 b
Valeurs moyennes de TAVP et d’acidité totale au 25 août selon les 4 classes de nombre de grappes par pieds (Test Anova)

L’évolution de l’acidité est similaire entre les 4 classes mais on observe des valeurs significativement différentes entre les vignes les moins chargées et les vignes les plus chargées au dernier prélèvement. Ces différences sont essentiellement liées aux concentrations initiales d’acide malique et tartrique contenue dans les baies avant le début de la véraison.

Compte tenu des ces résultats, nous pouvons penser que l’absence de précipitations au mois d’août aurait pu être fortement préjudiciable pour les parcelles les plus chargées. Il apparaît également que lorsque les températures, l’ensoleillement et la ressource en eau ne sont pas limitants, la charge a peu d’effet sur la cinétique de maturation.

MillésimeTAVP 50 % véraison
2022 7,2
2021 6,4
2020 7,2
2019 7,2
2018 6,8
2017 6,8
2016 6,2
2015 6,7
2014 6,5
2013 6,8
1994 6,5
TAVP moyen sur le réseau matu au stade mi-véraison

Millésime chaud et découplages de maturité

Nous constatons depuis une dizaine d’années que les millésimes chauds avec des maturations survenant tôt au mois d’août, ont tendance à changer nos repères sur les indicateurs de maturité. On parle régulièrement de décalage ou découplage de maturité pour illustrer le fait que, dans ces circonstances, les maturités phénoliques et aromatiques ne sont pas atteintes pour des valeurs faibles de TAVP.

Ce phénomène s’illustre en 2022 notamment par rapport aux valeurs de TAVP mesurées à la mi-véraison. Pour 2022, le TAVP moyen à mi-véraison se situe à 7,2 % vol, soit + 0,5 par rapport à la moyenne décennale. Le Pinot noir de l’Aube semblait toutefois présenter une maturité phénolique plus précoce que les autres régions.

Nous faisons un constat similaire sur les aspects aromatiques que nous évaluons à travers la dégustation des baies. Pour 2022, nous observons des bascules aromatiques (période de la maturation ou l’aromatique évaluée par le panel passe de "majoritairement végétale" à "majoritairement fruitée") pour des TAVP compris entre 10 % vol. et 10,5% vol. et des S/A supérieurs à 20 sur nos parcelles d’essais.

Charge en sucre, la bonne surprise

Malgré des contraintes hydriques localement fortes et des températures dépassant les 30 degrés, la charge en sucre a été dynamique jusqu’au début du mois de septembre. Comme constaté plus haut sur révolution du TAVP, on remarque que les précipitations ont permis de relancer la dynamique à partir du 17 août sur les 3 cépages. Le plateau de la charge est atteint autour du 31 août pour le Meunier et le Pinot noir. Fidèle à sa réputation, le Chardonnay a montré une charge très dynamique en fin de parcours et ce jusqu’au 2 septembre, Ceci témoigne d’une certaine tolérance du vignoble face aux conditions parfois extrêmes rencontrées en 2022.

En résumé

La maturation des raisins en 2022 s’est déroulée dans de très bonnes conditions grâce notamment à des précipitations tombées dans un volume et une temporalité idéale. L’état sanitaire de la récolte est parfait et n’aura pas été un frein aux ambitions qualitatives de l’année.

La cartographie des moûts mise en place par le laboratoire du Comité Champagne fait état d’un TAVP moyen tout cépages confondus de 10,4 % vol. ce qui est supérieur de 0,2 à la moyenne décennale, L’acidité totale et les pH caractérisent un millésime peu acide mais dans des proportions qui ne devraient pas nuire à la qualité des vins.

Comme le montre les autres paramètres de maturité, il est plus important que jamais de multiplier les prélèvements pour mieux appréhender ces nouveaux scénarios de maturations en conditions chaudes et sèches. Nous vous encourageons donc à saisir vos prélèvements maturité dans le portail collaboratif pour les futures campagnes pour mieux comprendre ces nouveaux scénarios.

Rendements Salutaires !

Après une année 2021 qui restera gravée dans la mémoire de tous les professionnels champenois avec tes rendements tes plus bas depuis près de 35 ans, la campagne 2022 tombe à point nommé avec des raisins de qualité dans des quantités généreuses.

Un potentiel incertain jusqu’à la nouaison

Dès la première semaine d’avril, des épisodes de gelées sont enregistrés sur l’ensemble du vignoble et font craindre le pire pour les secteurs les plus précoces. Les vignobles de l’Aube, de l’Aisne et du Vitryat sont touchés mais les dégâts sont sans commune mesure avec ceux de 2021. Au total, c’est environ 3 000 hectares qui sont touchés par les gelées soit une perte de récolte de l’ordre de 8 % à l’échelle Champagne.

Le début du cycle végétatif est ralenti par des épisodes de gel et la campagne 2022 démarre de manière plutôt tardive avec un débourrement en moyenne autour du 15 avril, soit 3 Jours plus tard que la moyenne décennale qui se situe au 12 avril. Une fois le cycle démarré, la pousse s’avère plutôt rapide sur les deux dernières semaines d’avril et laisse rapidement apparaître les premières grappes. Les observations de terrain confirment que le potentiel de récolte est important sur les 3 cépages avec ponctuellement 3 à 4 grappes par rameaux.

Les températures du mois de mai ont favorisé l’avancement de la phénologie et la pleine fleur est enregistrée au 30 mai pour le Chardonnay, 2 juin pour le Pinot et 7 juin pour le Meunier soit environ 10 Jours plus tôt que la moyenne décennale qui se situe au 13 juin. Le potentiel se confirme avec de belles grappes sur les 3 cépages. Toutefois, la floraison languissante sur certaines parcelles de Chardonnay laisse planer quelques doutes sur la qualité de la nouaison et la future conformation des grappes. Malgré un peu de coulure sur certaines parcelles, on observe quelques semaines plus tard que la nouaison s’est bien déroulée et que le potentiel de récolte devrait être préservé.

A la fin juin, des phénomènes orageux se développent autour de la Bourgogne et remontent vers le vignoble de l’Aube. Le 26 juin, un orage de grêle traverse tout le sud de la Côte des Bar de Channes à Rizaucourt-
Buchey
. Comme souvent avec les orages de grêle les dégâts sont localisés. Au total, c’est l’équivalent de 250 hectares de vignes pour lesquels l’intégralité de la récolte est perdue, soit 0,7 % de l’aire totale de l’Appellation.

Premières estimations prometteuses

Les comptages de grappes se mettent en place dès la fin de la floraison et nous collectons cette année les comptages réalisés sur un peu plus de 4 000 parcelles au total. Les comptages mettent en lumière des disparités importantes entre cépages et régions. Nous notons que les prévisions sur le Meunier dans les secteurs les plus touchés par le mildiou en 2021 sont en retrait. Ce phénomène est lié à deux causes :
d’une part les défauts d’aoûtement qui créer des bourgeons non viables pour l’année suivante, d’autre part, le manque de réserves de la vigne qui compromet le développement des grappes pour l’année en cours. Malgré cela, les comptages révèlent un nombre de grappes supérieur à la moyenne décennale pour les 3 cépages avec une moyenne de 9,7 grappes par m2.

ChampagnePotentiel gr/m2PMG possible (g)Rendement en kg/ha
Chardonnay 10,5 150 15 700
Pinot noir 10,1 145 14 500
Meunier 8,4 140 11 700
Moyenne 9,7 145 14 000
Estimation des rendements présentée à la Commission Qualité et Développement Durable le 7 juillet 2022. Les comptages proviennent des données transférées par les correspondant AVC et les représentants du négoce. L’estimation du poids de grappe est basée sur les observations de terrain.

Comme toujours, lorsque nous réalisons les estimations de rendement début juillet, la principale inconnue est le poids moyen des grappes pour lequel il est très délicat d’obtenir des estimations fiables. A ce stade précoce, nous utilisons généralement la moyenne décennale du poids de grappes pour réaliser les estimations. Toutefois, nous observons déjà des grappes bien conformées et la moyenne décennale de 132 grammes nous semble sous-estimer le potentiel de l’année. Par ailleurs, plusieurs comptages de baies réalisés sur le domaine expérimental nous donnent des nombres de baies par grappes compris entre 140 et 160. Nous formulons donc une hypothèse
optimiste avec un estimation du poids moyen à 145 grammes ce qui représente un rendement moyen de 14 000 kg/ha à la vendange. Les résultats obtenus grâce aux capteurs de pollens prévoit un rendement de 14 500 kg/ha et confortent donc les résultats des comptages. Enfin, à l’issue des tournées de l’AVC, les rendements annoncés par commune s’échelonnent de 11 000 à 17 000 kg/ha pour une moyenne comprise entre 14 000 et 14 500 kg/ha. Ce chiffre converge avec les autres sources.

Surprise sur le poids moyen des grappes

Les conditions chaudes et sèches rencontrées sur le mois de juillet ne sont a priori pas propices à des poids de grappes élevés. Au cours des vagues de chaleur successives, les températures frôlent, voire dépassent localement les 40 °C. Les températures enregistrées ne dépassent pas les valeurs de 2019 mais les vagues de chaleurs sont plus nombreuses en 2022. Dans ces conditions, nous craignons des dégâts record d’échaudage. Certaines parcelles de la Côte des Bar font état de perte de récolte de l’ordre de 20 % mais ces situations restent anecdotiques. A l’échelle de l’Appellation, nous estimons les pertes liées à l’échaudage à moins de 5 %.

Au lancement du réseau matu, le 8 août, les poids de grappes sont assez contenus et se situent autour de 100 g en moyenne. Sur les trois premiers prélèvements jusqu’au 15 août, la prise de poids est lente et les effets de la sécheresse se font sentir. A ce stade, il semble que le poids des grappes dépassera difficilement la moyenne décennale de 132 grammes.

L’arrivée des précipitations à partir du 15 août relance la dynamique de maturation et le poids des grappes explose sur les 3 cépages au prélèvement du 18 août.
Malgré des volumes de précipitations limités sur certains secteurs du vignoble, l’augmentation du poids des grappes se poursuit pour atteindre notre estimation optimiste de début juillet au dernier prélèvement du 25 août. Seul le Pinot noir de l’Aube marque le pas, notamment à cause des dégâts de grêle et d’échaudage et d’une contrainte hydrique parfois sévère localement.

Les données du portail collaboratif nous permettent également de continuer à suivre révolution de la maturation des raisins à la suite du ban des vendanges et nous constatons cette année que le poids moyen des grappes a continué d’augmenter Jusqu’à la fin août. Les poids moyens observés sont bien au-delà des estimations optimistes du début Juillet avec des valeurs pouvant atteindre ponctuellement 180 g
pour le Chardonnay et 160 g pour le Meunier au 30 août.

Poids moyen (g)27 août30 août
Chardonnay 163 181
Pinot noir 132 147
Meunier 140 157
Champagne 144 161
Poids moyen des grappes par cépage enregistré sur le portail collaboratif au 27 et 30 août. La moyenne Champagne présentée ici est pondérée par l’encépagement réel.

Au jour où nous rédigeons ces lignes, nous ne disposons pas de l’ensemble des données des déclarations de récolte pour fournir une valeur définitive du rendement 2022. Les données collectées sur les poids de grappes, au cours de la maturation, laissent penser que le rendement agronomique réel de 2022 pourrait être supérieur aux estimations du mois de juillet, entre 14 500 et 15 000 kg/h.

ChampagnePotentiel gr/m2PMG possible (g)Rendement en kg/ha
Chardonnay 10,5 163-181 17 000-19 000
Pinot noir 10,1 132-147 13 300-14 800
Meunier 8,4 140-157 11 800-13 200
Moyenne 9,7 150 14 500
Rendements agronomiques estimés à la vendange selon les poids moyen des grappes retenus pour chaque cépage