LES DERNIERS FEUX DU PLAISIR
A Bordeaux, au XVIIIe siècle.
« Je ne boirai plus que du vin de Champagne », avait décidé MarieBonnaventure.
Et elle s’était tenue à cette décision, affirmant que, si on ne satisfaisait pas à l’instant cette envie, son enfant naîtrait avec un accroc.
Une soirée chez le maréchal duc de Richelieu.
On gagna le grand salon où un buffet, tout resplendissant de velours, de brocart et de satin, était dressé. Mais les girandoles et les lustres de cristal n’avaient point été allumés, et les hôtes furent tenus de dîner éclairés par des chandelles fichées dans des crânes et de boire du vin de Champagne dans des têtes de mort.
Autre soirée chez le duc de Richelieu.
A mesure qu’il parlait en buvant du vin de Champagne, le gouverneur élevait une symphonie à la femme. [...] Le maréchal resta bientôt seul avec Marie-Bonnaventure. [...]
- Je vous redoute, dit doucement le vainqueur de Port-Mahon.
- Le beau mot pour un maréchal de France ! s’écria la princesse, offerte.
Richelieu, profitant de cette bonne humeur, la renversa sur la table même du souper, la mêlant aux fruits et aux fleurs. II bouscula quelques coupes de cristal qui se brisèrent. Leur murmure se mêla aux soupirs, la chair des fraises et des pêches à celle, toute chaude, des corps. Le maréchal déploya toutes ses ressources, la princesse tous ses enchantements.
Ils furent heureux.
- C’était donc cela ? dit le maréchal.
- Vous voyez qu’on apprend à tout âge, répliqua Marie-Bonnaventure en rafraîchissant négligemment ses seins du rebord délicat d’un verre de champagne.
1983
LA TERRASSE DES FEUILLANTS
- [...] Nous pourrions souper au champagne avec le Directeur et voilà que tu fais des mines !
- Souviens-toi, mon amie, [...] qu’il ne faut jamais accepter un verre de champagne quand on peut avoir la bouteille, ni une invitation à dîner, si l’on peut se faire établir.
1985