Œuvre d’Eric Glâtre de 2001
(actualisation UMC)
Natifs d’Aix-la-Chapelle, William Guillaume Deutz et Pierre Hubert Joseph Geldermannn s’associent à Edouard Lambry, pour fonder à Aÿ une affaire de négoce en vins de Champagne utilisant leurs noms accolés pour raison sociale « Lambry, Geldermann et Deutz », appelée à devenir la maison Deutz et Geldermann, en 1860, Lallier-Van Cassel, Durvin et Cie, en 1904, Lallier successeur, en 1914, de nouveau Deutz et Geldermann, en 1927, et enfin Deutz, en 1993.
La maison Delbeck et Cie devient « le fournisseur exclusif breveté » de la Cour de France, c’est-à-dire avec l’autorisation de porter les trois fleurs de lys sur ses étiquettes. Dans l’histoire de la Champagne, Delbeck et Cie est la seule maison qui ait reçu l’usage de ce « privilège royal ».
Les sept premières années de la société Lambry, Geldermann et Deutz sont ponctuées de divers voyages effectués principalement en Allemagne, à la recherche d’une clientèle, d’agents locaux et d’une notoriété, qui permet très tôt à la jeune maison de se développer à l’échelle internationale.
Durant cette période, William Deutz se rend neuf fois en Allemagne, étalant ses voyages sur des laps de temps allant de 3 mois et demi à 9 mois. Sa ville natale constitue souvent le point de départ de ses déplacements ; ensuite il progresse toujours vers le Sud, puis vers l’Est, et s’arrête en règle générale à Cologne, Bonn, Mayence, Wiesbaden, Francfort, Leipzig, Dresde, Berlin et Magdeburg.
Si le marché allemand tient une place prépondérante dans les affaires de la jeune maison, sa vocation internationale s’affirme de suite, avec les premières ventes en Belgique et en Angleterre (1838), en Russie et en Espagne (1839), en Autriche et aux Etats-Unis (1841), en Irlande (1844).
Lancement de la cuvée « Goldlack » de la maison Lambry, Geldermann et Deutz, élaborés à partir de différents vins de qualité supérieure achetés probablement sur lattes.
William Deutz fait mettre une feuille d’étain sur le goudron du col de ses bouteilles, pour éviter que les sommeliers se salissent les mains lors du service, ce qui n’est pas sans lui rapporter un franc succès.
René Deutz et Alfred Geldermann prennent peu à peu le contrôle de la maison Lambry, Geldermann et Deutz, qu’ils rebaptisent bientôt « Deutz et Geldermann », et font construire leurs premières caves et les bâtiments du boulevard du Nord, tels qu’on peut encore les voir aujourd’hui (coût : 425.660,89 francs-or).
Le Pol Roger« cuvée C » 1874 (à 3 % de dosage), peu connu des amateurs de champagne, prend la première place, devant les vins des maisons Pommery et Greno, Deutz et Geldermann et Irroy, lors d’une grande dégustation de 1874 réalisée ce jour, à Londres.
Non seulement, les retombées au niveau des ventes ne se font guère attendre, mais le millésime 1874 assied la réputation naissante de la marque en Angleterre.
A l’initiative des dirigeants des maisons Heidsieck et Cie, Giesler et Cie et G.H.Mumm et Cie, est constitué à Reims le Syndicat du Commerce des vins de Champagne, dont l’existence officielle sera reconnue par la loi du 21 mars 1884 autorisant la création des syndicats professionnels.
Selon ses statuts, il a pour but « de protéger, tant en France qu’à l’étranger, le commerce des vins mousseux de Champagne, de défendre les intérêts généraux de ce commerce en France dans l’examen des questions d’octroi, de régie, de tarifs, de transports, de propriété industrielle, c’est-à-dire de marques, noms de commerce, lieux d’origine, etc., […] à l’étranger dans l’examen des questions de tarifs internationaux, de douane, de propriété industrielle, de contrefaçons tant de marques que de produits, et de toutes autres fraudes… ».
Les maisons présentes à la réunion fondatrice présidée par Florens Walbaum, assisté d’Edouard Werlé, sont : Charles Arnould de Heidelberger, Barnett et Fils, Veuve Binet Fils et Cie, E. Bourgeois, Burchard Delbeck et Cie, Gondelle et Cie, Veuve Henry Goulet et Fils, Charles Heidsieck, Henriot et Cie, Ernest Irroy et Cie, Krug et Cie, Lanson Père et Fils, G.H.Mumm et Cie, Veuve Pommery Fils et Cie, Werlé et Cie, Ayala et Cie, Renaudin Bollinger et Cie, Deutz et Geldermann, Alfred de Montebello et Cie, Chandon et Cie, Pol Roger et Cie, Charles de Cazanove, Giesler et Cie, Lecureux et Cie, G. Loche, Fréminet et Fils, Heidsieck et Cie.
A la fin de l’année, 54 maisons figurent au nombre des adhérents du Syndicat du commerce des vins de Champagne.
A la mort de Pierre Geldermann, la gestion de la maison Deutz et Geldermann est confiée à deux fondés de pouvoir : Charles Pfeiffer et Henri Koehler. Les deux hommes concrétisent un projet sur lequel le fils d’Alfred et Marie Geldermann a beaucoup travaillé avant sa disparition : la création d’une filiale allemande à Haguenau, qui importe les vins de Champagne en fûts et les champagnise sur place.
Les avantages sont multiples : gain sur le transport des bouteilles, gain sur les droits de douane moins élevés sur les vins en vrac, satisfaction du nationalisme allemand et possibilité de concurrencer la production locale. Et le succès est au rendez-vous : trois ans plus tard, l’établissement emploie 30 personnes et produit déjà plus de 300.000 bouteilles.
La maison Deutz et Geldermann se voit décerner l’accréditation de « Fournisseur officiel de la Cour Royale d’Espagne ».
A la veille de la Première Guerre mondiale, la Fédération des Syndicats viticoles de la Champagne regroupe 121 syndicats locaux.
Désirant élaborer un champagne fin et bouqueté composé exclusivement de chardonnay, et en application du célèbre précepte selon lequel on n’est jamais mieux servi que par soi-même, Eugène-Aimé Salon crée au Mesnil-sur-Oger la maison de négoce en vins de Champagne A. Salon, avec l’aide son beau-frère, alors chef de caves dans une importante maison de négoce rémoise.
Pour éviter que la vague de germanophobie ambiante fasse chuter les ventes, René Lallier tente de faire disparaître les noms de « Deutz et Geldermann » des étiquettes de sa maison, au profit de « Deutz et Geldermann - Lallier successeur », puis de « Champagne Lallier - successeur de Deutz et Geldermann ».
Devant l’insuccès de la mesure, il revient à la marque initiale, mais en précisant sur la bouteille que les propriétaires sont des officiers français en service actif.
Le Comité de propagande des vins de Champagne reçoit le lord-maire de Londres et, en raison du goût des Anglais pour les champagnes anciens, il n’est servi au cours des différentes réceptions que des millésimes antérieurs à 1914 :
- 1904 : Werlé et Cie, successeurs de Veuve Clicquot-Ponsardin, Deutz et Geldermann, Pommery et Greno ;
Création de la cuvée « William Deutz », dédiée au fondateur de la maison Deutz et Geldermann et composée sur les bases « d’une sélection idéale du millésime, des crus et à l’intérieur de chaque cru : des meilleures vignes ».
Jean Lallier président de la Maison Deutz depuis 1938 quitte ses fonctions, son fils André Lallier lui succède.
La maison Deutz et Geldermann acquiert les Etablissements Delas Frères à Tournon-sur-Rhône, qui bénéficient d’une situation privilégiée au cœur des principales appellations de la partie septentrionale de la vallée du Rhône, et développe l’affaire dans le respect des traditions (qualité et sélection des approvisionnements) qui ont fait son succès en Champagne.
Trois jeunes musiciens du London Symphony Orchestra, Paul Edmund-Davis, flûtiste, Roy Carter, pianiste, et John Alley, hautboïste, décident de se produire sous le nom de « Deutz Trio », allusion à leur champagne préféré. Depuis, des relations privilégiées sont nées entre eux et la maison Deutz.
Prise de contrôle de la maison Deutz et Geldermann par la famille Rouzaud.
La Maison Louis Roederer est entrée à hauteur de 60% dans le capital de Champagne Deutz Grands Vins (CDGV), holding des champagnes Deutz, à la faveur d’une augmentation de capital (triplement de ses fonds propres).
Nommé par Jean-Claude Rouzaud à la présidence de la maison Deutz, Fabrice Rosset, avec son équipe, insufle un nouvel élan à la marque et renoue avec le succès commercial, dans le respect de l’esprit qui prévaut depuis sa création : « la qualité des vins, le raffinement, la pureté et l’authenticité ».